Fonds propres : La solvabilité est au plus bas

La chute des marchés actions et la crise des dettes souveraines ont fortement érodé la marge de solvabilité des assureurs. Si Groupama peine à reconstituer ses fonds propres, professionnels et experts se montrent toutefois confiants quant à la capacité du secteur à surmonter la crise.

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Trois jours avant la publication des comptes définitifs 2011 de l'assurance française, Standard & Poor's (S&P) a dégradé la note de Groupama de BBB- à BB, en catégorie spéculative. S'agit-il d'un cas isolé ou d'un mouvement de fond capable d'atteindre d'autres compagnies du secteur ? Sans surprise, les interlocuteurs ne se bousculent pas pour répondre. Le sujet met visiblement les professionnels mal à l'aise. Du côté de l'agence de notation, on argumente cette décision. « Nous avions mis Groupama sous surveillance avec implication négative en décembre 2011, le temps d'étudier les actions du management pour améliorer la solvabilité. Nous reconnaissons que le groupe a mis en place des actions stratégiques qui marquent un tournant, notamment en réduisant son exposition aux risques de marché », explique Virginie Crepy, analyste chez Standard & Poor's. Avant de préciser : « Néanmoins, ces actions sont, de notre point de vue, insuffisantes pour redresser la solvabilité à un niveau en ligne avec un rating BBB-, surtout dans l'environnement économique et financier actuel. Et la flexibilité financière de Groupama nous semble limitée. »

La peau sur les os

Le reste du secteur est-il mieux loti ? Les résultats 2011 de l'ensemble des mutuelles et compagnies d'assurances françaises membres de la FFSA et du Gema montrent qu'« après cinq années de crise, les assureurs n'ont plus que la peau sur les os », estime le directeur général d'une compagnie. Signe de faiblesse alarmant, la solvabilité des activités vie peine à atteindre le minimum réglementaire. D'après les chiffres 2011, les fonds propres et les plus-values latentes couvrent 3,8% des provisions mathématiques contre 5,7% l'an dernier. Entre-temps, le matelas de plus-values latentes a chuté de 57 à 17 Md€. Étant donné la répartition des contrats des sociétés, la FFSA évalue le besoin de marge à 3,5% actuellement.

Un artifice de calcul

Conclusion : le secteur respecte les ratios et l'assurance française tient le choc, selon son délégué général, Jean-François Lequoy (lire son interview page 16). Pourtant, si l'on applique les textes réglementaires à la lettre, les assureurs ne devraient pas intégrer les plus-values latentes dans le calcul de leur solvabilité. Il s'agit d'une simple tolérance de la part du régulateur, comme le confirme l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP).

Cela change tout. Si l'on se base sur les seuls fonds propres, la solvabilité n'est plus que de 2,9%, un plancher que l'on n'avait pas vu depuis les années 1990, bien inférieur au minimum requis. Faut-il s'en inquiéter, notamment à l'avant-veille de l'entrée en vigueur de nouvelles règles prudentielles ? « Ne pas respecter la marge de solvabilité une année ne signifie pas que l'assureur est en faillite », tempère Romain Durand, partner chez Actuaris, avant de préciser : « Sous Solvabilité 1, la marge de 4% applicable par les sociétés vie est "forfaitaire". Sous Solvabilité 2, la marge est calculée en fonction des risques intrinsèques de l'entreprise, en prenant en compte la nature des investissements, le risque de marché, de contrepartie, etc. La détermination de la marge nécessaire est donc plus complexe, et il n'est donc pas sûr que si les assureurs étaient déjà sous Solvabilité 2 dans un environnement financier comme celui-ci, ils auraient plus ou moins de difficultés qu'aujourd'hui. »

Même son de cloche chez les analystes de S & P : « Globalement, même si les notations d'une bonne partie des acteurs du secteur sont sous perspective négative, la plupart des notes sont toujours dans la catégorie des A, c'est-à-dire d'investissement. Néanmoins, en 2011, le secteur a connu encore plus de pression qu'en 2008, car, à la chute des marchés actions, très volatils, s'est cumulée l'augmentation du risque de crédit et une persistance de taux bas », analyse Lotfi Elbarhdadi, directeur groupe assurances chez Standard & Poor's.

Là où il y a de l'IARD, il y a de l'espoir

Malgré tout, l'agence de notation ne voit pas tout en noir : l'horizon a beau être très incertain sur les marchés actions et obligataires, tout comme pour les perspectives économiques, plusieurs indicateurs restent bien orientés : la position concurrentielle des assureurs notés reste forte, et leur liquidité est solide. La rentabilité de la branche dommages se porte mieux, grâce à la clémence de la sinistralité et aux hausses tarifaires, qui ont permis d'améliorer les résultats techniques. D'ailleurs, autant l'assurance vie est dans la tourmente, car frappée à la fois au passif et à l'actif, autant les assureurs dommages s'en sortent mieux, car uniquement frappés du côté de leurs actifs financiers.

Bref, les temps sont durs, mais les assureurs se disent raisonnablement confiants quant à la capacité du secteur à surmonter la crise.

CALCUL DE LA SOLVABILITÉ

  • Pour les sociétés d'assurances vie et mixtes (vie et dommages corporels), les fonds propres doivent représenter 4% des provisions mathématiques des contrats en euros et 1% pour les contrats en unités de compte.
  • Pour les sociétés d'assurances de dommages, les fonds propres doivent couvrir une exigence de marge égale à 16% des cotisations annuelles ou 23% du montant moyen des sinistres des trois derniers exercices si celui-ci est plus élevé.

 

Jean-François Lequoy, délégué général de la FFSA

« L'assurance française résiste »

  • La marge de solvabilité, tout particulièrement des sociétés vie, n'a jamais été aussi basse. Est-ce préoccupant ?

Fin 2011, l'assurance retrouve un niveau de marge de solvabilité proche de celui de 2008, compte tenu de l'érosion importante des plus-values latentes. Ces dernières sont de l'ordre de 17,4 Md€ contre 57,4 Md€ en 2010. Cette baisse tient essentiellement au recul des marchés actions. Pour autant, le niveau de marge de solvabilité demeure très significativement supérieur à la marge réglementaire pour l'ensemble du marché vie et non-vie.

  • Cette situation ne va-t-elle pas se traduire par des restructurations au sein du secteur ?

Les compagnies ne cessent de s'adapter dans un environnement très difficile, que ce soit dans leur politique d'allocation d'actifs ou de cession. En 2011, le secteur a dégagé un résultat de 5,9 Md€. L'assurance française tient le choc et continue à assumer ses missions de protection des particuliers et des entreprises, ainsi que de financement de l'économie.

  • L'assurance vie peut-elle être encore considérée comme le placement préféré des Français, alors qu'elle ne représente plus, en 2011, qu'un quart des flux de placement contre près de 89% en 2010 ?

La situation est, là aussi, proche de celle de 2008, avec un attrait réel pour les liquidités au regard des incertitudes concernant l'avenir. Néanmoins, l'assurance vie conserve tous ses atouts et sa capacité à accompagner les besoins fondamentaux des assurés sur la totalité d'un cycle de vie. Nous sommes dans une situation exceptionnelle, mais conjoncturelle. Simplement, dans un tel contexte, il est important de donner des signes positifs en faveur de l'épargne longue. La croissance et l'emploi de demain dépendent de l'investissement à long terme.

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