ACP, AMF : dualité d'autorités de contrôle et rapprochement

En dépit du maintien d'autorités de contrôle distinctes, l'Autorité de contrôle prudentiel et l'Autorité des marchés financiers oeuvrent dorénavant dans le même sens, favorisant ainsi un rapprochement des contrôles des protagonistes de l'intermédiation financière et assurantielle.

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Les similitudes des produits distribués et des modes de commercialisation de ces produits imposent, en fait et de plus en plus, la nécessité d'un contrôle concerté des intermédiaires d'assurances et financiers, renforcée par le cumul des différents statuts par un même acteur.

À titre d'exemple, un intermédiaire est en pratique susceptible de cumuler les casquettes de conseiller en investissement financier et d'intermédiaire en assurances, et ainsi relever de l'AMF et de l'ACP, ce qui pose la question de l'harmonisation des contrôles dont il peut faire l'objet.

Le contrôle de l'Autorité des marchés financiers

Créée par la loi de sécurité financière du 1er août 2003, l'Autorité des marchés financiers (AMF) est une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale.

L'AMF est chargée de veiller à la protection de l'épargne investie en produits financiers, à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés.

Missions et organisation de l'AMF

L'AMF veille à la régularité des opérations effectuées sur des instruments financiers lorsqu'ils sont offerts au public et sur des instruments financiers et actifs admis aux négociations sur un marché réglementé ou non réglementé (CMF, art. L. 621-9). L'autorité s'assure également du respect des obligations professionnelles auxquelles sont astreintes, en vertu des dispositions législatives et réglementaires, les entités ou personnes relevant de son contrôle, ainsi que les personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte. Relèvent notamment de la surveillance de l'AMF les conseillers en investissements financiers (Cif) et les agents liés. Elle veille, d'ailleurs, à ce que les entreprises soumises à son contrôle mettent en oeuvre des moyens adaptés pour se conformer aux codes de conduite homologués.

S'agissant des Cif, il convient de noter que leur contrôle est en réalité double. En premier lieu, ils relèvent du contrôle des associations professionnelles auxquelles ils adhèrent. En effet, tout Cif doit adhérer à une association chargée de la représentation collective et de la défense des droits et intérêts de ses membres. Ces associations s'assurent ainsi du respect, par leurs membres, de la réglementation qui leur est applicable, notamment celui des conditions d'accès ou des règles de bonne conduite. Par délégation de l'AMF, elles peuvent contrôler l'activité de leurs membres (CMF, art. L. 621-9-2).

En second lieu, le Cif est aussi soumis au contrôle institutionnel de l'AMF, laquelle vérifie la délivrance de l'agrément des associations professionnelles, l'approbation des codes de bonne conduite élaborés par ces dernières, et dispose de pouvoirs de contrôle et de sanction à l'égard des Cif et des associations professionnelles en cas de manquement à leurs obligations.

Modalités du contrôle

Dans le cadre de l'exercice de son pouvoir de contrôle, l'AMF peut effectuer des contrôles ou enquêtes (CMF, art. L. 621-9). Généralement, une enquête est diligentée à la suite des constatations faites par les équipes chargées de la surveillance du marché ou à la suite de réclamations.

Les enquêteurs de l'AMF effectuent des contrôles sur pièces et sur place et peuvent, pour les nécessités de l'enquête, se faire communiquer tous documents, quel qu'en soit le support.

Les contrôles et enquêtes font l'objet d'un rapport écrit. Après examen de ce rapport ou sur demande formulée par le président de l'AMF, le collège peut :

- ouvrir une procédure de sanction ;

- transmettre le rapport au procureur de la République ;

- transmettre le rapport à d'autres autorités ;

- ne pas donner de suite.

Si le collège de l'AMF décide de l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les griefs à la personne concernée et à la commission des sanctions, qui rend une décision motivée pouvant être rendue publique. Aux sanctions disciplinaires (adaptées selon que l'entité contrôlée est une personne physique ou une personne morale) peut s'ajouter une sanction pécuniaire. Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements.

L'autorité de contrôle unique : ACP

L'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), autorité administrative indépendante adossée à la Banque de France, est chargée de l'agrément et de la surveillance des établissements bancaires et d'assurances, dans l'intérêt de leurs clientèles et de la préservation de la stabilité du système financier.

Partant du constat qu'un contrôle prudentiel unique des secteurs et des acteurs de la banque et de l'assurance serait nécessaire pour améliorer la supervision des activités financières (rapport « Deletré » 2), l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) a été créée par l'ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010.

Missions et organisation de l'ACP

L'ACP a pour mission de veiller, comme l'AMF, à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle (CMF, art. L. 612-2). Elle est notamment chargée de veiller au respect par les personnes soumises à son contrôle des règles destinées à assurer la protection de leur clientèle, résultant notamment de toute disposition législative et réglementaire ou de codes de conduite homologués.

Pour l'accomplissement de ses missions, notamment la protection de la clientèle, l'ACP dispose d'un pouvoir de contrôle, du pouvoir de prendre des mesures de police administrative et d'un pouvoir de sanction. En outre, l'autorité peut porter à la connaissance du public toute information qu'elle estime nécessaire à l'accomplissement de ses missions.

L'ACP comprend un collège et une commission des sanctions. Sauf disposition contraire, les attributions confiées à l'autorité sont exercées par le collège, qui statue en formation plénière, en formation restreinte, en sous-collège sectoriel, ou, le cas échéant, en commission spécialisée.

Une telle organisation permet d'assurer une séparation des fonctions (CMF, art. L. 612-9 : « Les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège », et de garantir ainsi l'indépendance et l'impartialité de l'autorité dans l'exercice des pouvoirs de sanction. À cet égard, le Conseil d'État a récemment annulé deux avertissements prononcés par l'Acam - devenue l'ACP - sur le fondement de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CE, 22 décembre 2011, n° 323612 et n° 323613).

En l'espèce, le Conseil d'État a re-levé que la possibilité qui était donnée à l'Acam de s'autosaisir, licite en soi, n'était toutefois pas assez encadrée en l'état. Plus précisément, la Haute Cour a constaté que cinq des sept membres du collège de l'Acam ayant siégé le jour où la sanction a été prononcée avaient également participé à la délibération qui avait pour objet de décider s'il fallait ou non ouvrir une procédure disciplinaire à l'encontre de la requérante. Les procédures considérées méconnaissaient, dans ces conditions, l'exigence d'impartialité de l'article 6 de la CEDH, justifiant que les avertissements prononcés à l'encontre de la requérante soient alors annulés.

Modalités du contrôle

Le secrétaire général de l'ACP organise les contrôles sur pièces et sur place.

En cas de contrôle sur place, un rapport est établi. Son projet est porté à la connaissance des dirigeants de l'entité contrôlée, qui peuvent faire part de leurs observations, dont il est fait état dans le rapport définitif.

Les suites données aux contrôles sur place sont communiquées soit au conseil d'administration, soit au directoire et au conseil de surveillance, soit à l'organe délibérant en tenant lieu, de l'entité contrôlée, et peuvent également être communiquées à ses commissaires aux comptes.

En cas d'infractions aux dispositions législatives ou réglementaires par un organisme soumis à son contrôle, ou en cas de non-respect d'engagements pris, la commission des sanctions peut prononcer une ou plusieurs sanctions disciplinaires, en fonction de la gravité des manquements, parmi les suivantes (CMF, art. L. 612-39) : avertissement, blâme, interdiction d'effectuer certaines opérations et toute autre limitation de l'exercice de son activité, suspension temporaire ou démission d'office de dirigeants, retrait partiel d'agrément ou retrait total d'agrément ou radiation de la liste des personnes agréées.

L'Autorité de contrôle prudentiel peut également prononcer, soit à la place, soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire au plus égale à cent millions d'euros.

Une synergie du contrôle des relations entre les professions assujetties et leurs clientèles

Rappelons que sur le plan pratique, l'AMF et l'ACP poursuivent un objectif commun, celui de veiller à la protection du consommateur.

Dans ce contexte, l'idée d'une coordination entre les autorités de contrôle bancaires-assurantielles et l'AMF, pour permettre une plus grande efficacité des actions menées, a assez rapidement émergé. Afin de renforcer le contrôle de la commercialisation des produits financiers opérée par les entités dont elles contrôlent chacune les activités, les pouvoirs publics ont institué, en parallèle de la création de l'ACP (ordonnance du 21 janvier 2010), un pôle commun à l'ACP et l'AMF (CMF, art. L. 612-47 à L. 612-50).

Dans le communiqué de presse commun de l'AMF et de l'ACP du 30 avril 2010, les deux autorités font savoir que « la mise en place de ce mécanisme de coordination entre l'ACP et l'AMF répond à l'objectif d'améliorer la protection des clients en prenant en compte l'imbrication croissante entre les différents produits d'épargne et le développement d'acteurs à même de distribuer toute la gamme des produits financiers » (communiqué de presse ACP-AMF du 30 avril 2010).

Pôle commun

L'objectif de ce pôle commun est de permettre aux deux autorités de mettre en oeuvre un contrôle coordonné, d'échanger toutes les informations nécessaires à l'exercice de leurs missions, de s'alerter mutuellement sur les risques de mauvaise commercialisation, de dialoguer sur les meilleurs moyens de les circonscrire et de lancer des actions communes en appui des politiques de contrôle développées par chaque autorité.

En particulier, le pôle commun est chargé, sous la responsabilité des deux autorités (CMF, art. L. 612-47), de :

- définir et coordonner les propositions de priorités de contrôle des professionnels assujettis et mettre en oeuvre des contrôle coordonnés ;

- analyser les résultats de l'activité de contrôle des deux autorités et soumettre aux secrétaires généraux les conséquences et enseignements à en tirer dans le respect des compétences de chaque autorité ;

- coordonner la veille sur l'ensemble des opérations et services et la surveillance des campagnes publicitaires relatives à ces produits ;

- offrir un point d'entrée commun habilité à recevoir les demandes des clients, assurés, bénéficiaires, ayants droit et épargnants susceptibles d'être adressées à l'Autorité de contrôle prudentiel ou à l'Autorité des marchés financiers.

Chaque année, les deux autorités établissent conjointement un rapport rendant compte de l'activité de leur pôle commun (lire Rapport d'activité du pôle assurance-banque-épargne 2010). Le coordonnateur de ce pôle est désigné alternativement au sein des équipes de l'ACP et de l'AMF et veille à son bon fonctionnement.

Une convention signée entre l'ACP et l'AMF le 30 avril 2010 définit les modalités de fonctionnement de ce pôle commun, en particulier celles ayant trait à l'exercice des missions du pôle, telles que prévues par le code monétaire et financier (CMF, art. L. 612-47).

Toutefois, pôle commun ne signifie pas fusion... Ce pôle commun est envisagé comme un mécanisme de coordination qui n'ajoute ni ne retranche aucune compétence ni aucun pouvoir aux deux autorités. Toute décision demeure prise uniquement par l'ACP ou l'AMF.

Point d'entrée commun

Toujours dans un souci d'harmonisation des méthodes et des approches, l'Autorité de contrôle prudentiel et l'Autorité des marchés financiers ont lancé, le 28 juin 2011, le point d'entrée commun destiné à informer et orienter le public pour toute question concernant lŽassurance, la banque, la Bourse et les produits d'épargne.

Ce service commun, dénommé Assurance Banque Épargne Info Service, consiste en un site Internet et un accueil téléphonique, mettant à la disposition du public des informations générales concernant les produits, contrats et services financiers, ainsi que les démarches en cas de litiges.

Bilan

Les statistiques publiées par le pôle commun montrent le succès du point d'entrée commun auprès du public qui, sans publicité particulière, a identifié et fait usage de ce nouveau portail de renseignements, créant ainsi une « vraie dynamique ».

Plus largement, s'agissant du pôle commun, la Cour des comptes dresse un bilan plus mitigé, à l'occasion de la publication de son rapport sur la mise en place de l'ACP, estimant que « par rapport au vaste domaine d'intervention sur les pratiques commerciales, ce pôle commun doit encore faire ses preuves » (Cour des comptes, commission d'enquête, « Les modalités de mise en place de l'Autorité de contrôle prudentiel », octobre 2011).

D'ailleurs, la Cour des comptes appelle de ses voeux l'accroissement de la coopération entre l'ensemble des intervenants dont la mission est d'assurer la protection des consommateurs, et suggère une plus grande coopération avec la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), particulièrement dans les domaines de la veille publicitaire et des pratiques commerciales.

L'Autorité des marchés financiers et l'Autorité de contrôle prudentiel veillent à la mise en oeuvre des codes de conduite homologués.

Les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège.

À RETENIR

L'ACP et l'AMF sont susceptibles de contrôler une même entité au titre de ses différentes activités qui justifie l'existence d'un pôle commun visant à coordonner le contrôle.

À NOTER

Le pôle commun ne fusionne pas l'AMF et l'ACP, qui conservent la plénitude de leurs compétences. En 2010, le pôle commun ACP-AMF a reçu 1 511 appels (incluant le point d'entrée commun), contre 690 en 2009 (rapport ACP-AMF 2010).

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