Amrae 2018 : les temps forts

Assureurs, courtiers, gestionnaires de risque... Ils ont été nombreux à faire le déplacement à Marseille, où se tenaient cette année les 26es rencontres du risk management.

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Amrae 2018 : les temps forts

Carton plein, malgré les chutes de neige qui ont retardé l’arrivée à bon port, en temps et en heure, de nombreux congressistes ! La 26e édition des rencontres du risk management, qui se sont tenues du 7 au 9 février à Marseille, a battu des records de fréquentation. Assureurs, courtiers, risk managers, juristes, prestataires… Sur un total de 2 853 personnes inscrites (soit 300 de plus qu’en 2017), 2 740 ont effectivement fait le déplacement dans la cité phocéenne et retiré leur badge d’accès à l’accueil du parc Chanot, à deux pas d’un stade Vélodrome balayé, malgré un beau soleil d’hiver, par un mistral glacial.

Elle-même native de Marseille, Brigitte Bouquot, la présidente de l’Amrae, souhaitait associer les acteurs du tissu économique local à l’événement et « réconcilier le Nord et le Sud ». Et leur donner la parole. Ils ont visiblement répondu à son appel puisqu’une partie des congressistes étaient du cru : 186 participants venaient en effet de la région Paca, dont 152 du seul département des Bouches-du-Rhône. Retour sur ces deux jours et demi de congrès.

L’entreprise au cœur de l’économie

« On clive en passant du Sud au Nord, où tout est plus sérieux, plus riche, plus gris aussi. On y perd son accent… » Émue, Brigitte Bouquot, présidente de l’Amrae, ne pouvait pas entamer son discours d’ouverture sans avoir un mot pour sa ville natale, qu’elle a quittée en 1976 afin de poursuivre ses études à Paris. Passée l’émotion de ce retour « professionnel » à Marseille, la directrice de la gestion des assurances et de la gestion des risques du groupe Thales est vite entrée dans le vif du sujet. À une époque où « les États nations se sont affaiblis, ce sont les entreprises, a-t-elle martelé, qui font avancer le monde. » De par leurs investissements, « créateurs d’emplois », et leur innovation, « déterminante pour la révolution technologique ou la transition énergétique » que les pouvoirs publics appellent de leurs vœux.

Bien sûr, dans un contexte de risques planétaires (tensions géopolitiques, migrations, instabilité du système économique, fractures sociales, failles technologiques, défi climatique, etc.), les entreprises doivent s’adapter et « comprendre ces enjeux globaux, dans lesquels elles sont impliquées ». Mais ces nouveaux caps, elles ne les franchiront qu’en adoptant « une approche transversale pour gérer globalement le risque d’entreprendre. Ce risk management accompagne l’entreprise de bout en bout et sur la durée, à chaque moment décisif de sa vie. » La présidente de l’Amrae, dont l’un des leitmotivs est la gouvernance des risques, a ainsi insisté sur la nécessité pour les risk managers de se rapprocher des équipes conformité et audit interne. Notamment dans le domaine de la protection des données, sujet éminemment d’actualité, avec la prochaine entrée en vigueur du règlement général pour la protection des données (RGPD).

Les États nations sont affaiblis, ce sont les entreprises qui font avancer le monde.

Brigitte Bouquot, présidente de l’Amrae

Incertitudes sur la finance mondiale

Quels sont les grands risques d’instabilité économique et financière ? C’est à cette vaste question qu’étaient invités à répondre, en préambule de ces 26e rencontres de l’Amrae, Philippe Donnet, directeur général du groupe Generali, Philippe Dessertine, économiste, et Todd Jones, directeur risque d’entreprise et courtage chez Gras Savoye Willis Towers Watson. Entre « le retour de la croissance aux États-Unis – avec une situation de quasi plein emploi – et en Europe, ainsi qu’une croissance toujours forte en Chine et en Asie » et des risques climatiques forts et des risques démographiques pesant sur l’équilibre planétaire, le patron de Generali admet que cette conjugaison de risques « crée des difficultés ». Et c’est sans compter des « nuages qui restent importants » à l’image des risques géopolitiques majeurs (Corée du Nord, Iran et Moyen Orient). Mais, selon lui, « il ne faut pas paniquer. L’inflation reste contenue, les risques financiers paraissent encore supportables ». Il décrit même le paysage économique comme « assez équilibré ». Philippe Dessertine, lui, se veut beaucoup plus mesuré : après la crise financière de 2007-2008, « on n’avait jamais connu une intervention aussi forte des banques centrales. Il n’existe aucune référence permettant de dire ce qui va se passer ». Bref, c’est un peu le saut dans l’inconnu aujourd’hui. « On pressent bien qu’on est en haut d’un cycle » avec, à la clé, ajoute-t-il, un risque d’inflation et des taux longs qui pourraient augmenter plus fortement que ce qui était escompté il y a encore peu.

Il ne faut pas paniquer. L’inflation reste contenue, les risques financiers paraissent encore supportables.

Philippe Donnet, directeur général du groupe Generali

L’enjeu des risques climatiques

S’il se veut résolument optimiste, Philippe Donnet reconnaît volontiers que la « croissance ne sera durable que si elle est solidaire et inclusive ». Bref, si elle ne laisse personne au bord du chemin. Et si aucun sujet n’est délaissé. Notamment ceux ayant attrait aux questions climatiques. Or, rappelle-t-il, « les risques climatiques sont forts. Le réchauffement de la planète n’a pas été stoppé. Loin de là. » Lors d’une autre table ronde, Bernard Spitz, président de la Fédération française de l’assurance (FFA) a d’ailleurs insisté sur le rôle du secteur dans la protection de l’environnement. En France, les assureurs jouent un triple rôle, important, dans la finance verte : un rôle d’indemnisation, un rôle de financement, un rôle de prévention. « Pour réduire le risque de catastrophes naturelles, il est important d’agir. Si on ne fait rien, les épisodes de sécheresse, par exemple, devraient être multipliés par deux d’ici à vingt ans. Mais cette responsabilité se partage entre les assureurs et l’État. Il est même nécessaire d’agir dans le cadre d’une gouvernance internationale, alors même que le multilatéralisme est remis en cause par les États-Unis et leur président Donald Trump », a ainsi estimé le président de la FFA.

Si on ne fait rien, les épisodes de sécheresse devraient être multipliés par deux d’ici à vingt ans.

Bernard Spitz, président de la Fédération française de l’assurance

Un climat plus favorable en France

À Marseille, tout le monde en a convenu. À l’échelle mondiale, de nombreuses zones d’incertitude subsistent. Mais en France, il y a du mieux. Le climat est plus favorable, l’élection d’Emmanuel Macron ayant apporté, de l’avis de tous, un grand bol d’air frais. Mais attention, pas d’euphorie non plus. Si Fabrice Domange, président du directoire de Marsh France, se félicite d’avoir « réalisé une année record avec 10 % de nouveaux business par rapport à 2016 », l’heure n’est pas encore à une franche reprise du marché des grands risques, industriels notamment. Ne serait-ce que parce que la pression est toujours aussi forte sur les tarifs, même si les catastrophes naturelles survenues l’an dernier devraient – un peu – faire remonter le prix des primes en assurance dommages. Ceci étant, il y a longtemps que l’économie tricolore ne s’était pas montrée en aussi bonne santé. Sur le papier du moins. L’OCDE escompte ainsi une progression du produit intérieur brut français (PIB), véritable marqueur de l’activité économique, de 1,8 % cette année et de 1,7 % l’an prochain. C’est nettement moins qu’en Allemagne, par exemple (2,3 % attendus en 2018 et 1,9 % en 2019) mais, comme le dit un grand courtier présent à Marseille, « qui dit relance de l’économie, dit croissance, qui dit croissance dit augmentation de la masse assurable ».

L’omniprésence du cyber

On en avait déjà beaucoup parlé un an plus tôt à Deauville mais, cette année à Marseille, il a particulièrement été question de risques cyber. Pas étonnant après les attaques mondiales survenues en 2017 (WannaCry et NotPetya) qui ont fortement marqué les esprits et un niveau de primes placées estimé à 50 M€ sur le marché. Claude Imauven, directeur général exécutif de Saint-Gobain, a d’ailleurs révélé à Marseille que l’attaque dont son groupe a été victime en juin 2017 lui avait coûté 220 millions d’euros de chiffre d’affaires et 80 millions d’euros de résultat net. Parmi les 27 ateliers ayant été organisés lors de ces 26e rencontres du risk management, 6 ont été suivis par plus de 150 participants dont deux consacrés au cyber et à la voiture connectée et autonome, ce type de véhicules étant, par essence, exposé au risque cyber. Clairement, ce sujet est la plus grosse source d’inquiétude. Il constitue d’ailleurs « la menace la plus prégnante d’ici fin 2018 » aux yeux des directeurs des risques des 30 principales sociétés d’assurance et de réassurance en France. Selon le baromètre des principaux risques émergents présenté à Marseille par la FFA, le cyber devance, en effet, l’effondrement financier, le changement climatique, la politique internationale et l’avalanche réglementaire.

Vers un hard Brexit ?

Un autre mot était sur toutes les lèvres aux rencontres de l’Amrae : Brexit. « Nous sommes dans un moment d’incertitude, constate Nadia Coté, directrice générale de Chubb France. Y aura-t-il un hard ou un soft Brexit ? Nous, assureurs, avons le devoir de travailler sur la base d’un scénario hard », dans lequel le Royaume-Uni perdrait son droit de passporting permettant à une entreprise d’un pays de l’EEE (Espace Économique Européen) d’exercer librement son activité dans un autre État membre. C’est d’ailleurs à cette fin que Chubb a choisi d’implanter son siège européen à Paris, tandis qu’AIG, Hiscox ou Liberty ont jeté leur dévolu sur le Luxembourg, Admiral sur l’Irlande ou le Lloyd’s sur… Bruxelles. La capitale anglaise restera « un centre mondial de l’assurance et de la réassurance », insiste Guy-­Antoine de la Rochefoucauld, directeur général du Lloyd’s en France tout en reconnaissant que l’objectif pour lui est « d’assurer une continuité de service dans la souscription et le règlement des sinistres ». Quel serait l’impact d’un scénario hard sur les programmes d’assurance ? Guy-­Antoine de la Rochefoucauld juge que « certaines classes spécialisées devraient continuer à bénéficier des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour les biens en mouvements (aviation en corps et en responsabilité, satellites, marchandises transportées, corps de navires et responsabilités, réassurance) ». En revanche, « les autres classes spécialisées (NDLR : aviation pour les aéroports, maritime pour les ports, les voies fluviales, risques politiques, etc.) nécessiteront, dans la plupart des cas, un programme pour l’UE et un programme pour le Royaume-Uni ». Alexandre Regniault, avocat associé chez Simmons & Simmons, s’est dit préoccupé, quant à lui, par l’évolution du droit des contrats. « Il y a un intérêt absolu à faire attention à la clause de la loi applicable » lorsqu’il est possible de choisir une autre loi que la loi française, avertit le juriste, indiquant que « la nouvelle législation au Royaume-Uni (NDLR : l’Insurance Act de 2015) ne fait pas encore l’objet de jurisprudence notable ». Autre problématique : celle des juridictions compétentes en cas de litige. Même chose que la question du droit applicable aux contrats. Mieux vaut préciser dans les polices quelle est la juridiction compétente en cas de litige. Et d’avertir : « c’est quand on ne choisit pas du tout qu’on a le plus d’incertitudes » !

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