Assistance : Comment faire pour reprendre la vague
Les assisteurs observent une transformation de leur activité traditionnelle. Si l'automobile et le voyage représentent une importante part du chiffre d'affaires, ils n'en connaissent pas moins une faible croissance. Innover, réduire les coûts, réorganiser les plates-formes, s'engager dans les pays émergents : les idées ne manquent pas. Mais celles-ci se heurtent parfois aux questions de volume.
Au coeur de l'activité d'assisteur, le dépannage automobile reste l'activité phare, puisqu'elle a représenté 57,6 % du chiffre d'affaires en 2011 en France, et 70,3 % des dossiers traités. Pour autant, ce secteur traditionnel montre des signes d'essoufflement en Europe : au global, la croissance a plutôt été discrète. Le chiffre d'affaires de l'automobile n'a progressé que de 1 % en 2011 par rapport à 2010. Si l'on prend en compte le nombre d'interventions, il a même reculé de 1,4 %. En outre, une tendance de fond vient assombrir le tableau : les ventes de véhicules neufs ont chuté de 8,7 % en mai sur un an dans l'Union européenne, selon des données de l'Association des constructeurs européens automobiles (Acea). En France, elle a même fortement chuté (- 16,2 %). Et tandis que la panne constitue 80 % des interventions, la fiabilité accrue des véhicules...n'est pas forcément une bonne nouvelle.
Dans ce contexte, la réponse des assisteurs est de plusieurs ordres. Avec pour objectif de gagner des parts de marché là où l'activité est encore en expansion. C'est-à-dire au sein des pays émergents. C'est ainsi qu'en 2011, Axa assistance a engagé une opération d'approche du marché chinois, et couvre aujourd'hui 300 000 véhicules. « Nous visons même 1 million à la fin 2012, grâce à la signature avec une importante compagnie d'assurances chinoise », s'enthousiasme Serge Morelli, PDG d'Axa assistance. Mais déjà, en Inde, l'assisteur dispose du réseau le plus important avec un maillage fin du territoire, soit un dépanneur tous les 20 kilomètres. Mê-me chose chez Allianz Global Assistance. L'assisteur allemand a réalisé une croissance à deux chiffres dans les pays dits BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine). Ainsi, en Chine, grâce à ses partenaires Mercedes, Land Rover, Volvo, Ford et BMW, il a vu son chiffre d'affaires grimper de 64 %.
Nous visons 1 million de véhicules assurés fin 2012 en Chine.
Serge Morelli, PDG d'Axa assistance
Le temps de l'électrique
Le véhicule électrique constitue une autre voie. Cette innovation soulève beaucoup d'espoir... Mais il reste un pari, car le phénomène reste marginal. Même si d'ici à cinq ans, plus de 250 modèles électriques et hybrides devraient être commercialisés, le décollage est lent, et un coup de pouce de l'État se fait attendre pour un développement à grande échelle (lire encadré p. 39). Pour autant, Europ assistance, IMA, Acta, Mondial assistance ou Axa assistance, par exemple, prennent leur mal en patience et utilisent ce temps pour former les chargés d'assistance et les prestataires. En effet, ces derniers doivent être habilités à effectuer des interventions de mise hors tension des batteries électriques. La difficulté étant que les véhicules électriques ne peuvent pas être tractés comme les voitures à moteur thermique, mais doivent être remorqués sur un plateau et apportés dans un garage agréé. « Le coût moyen est plus élevé, car il faut plus de prestations (taxis, hôtels, véhicules de remplacement), puisqu'on ne peut pas réparer sur place, explique Dan Assouline, PDG de Mondial assistance France. On pensait vraiment que les volumes de vente seraient plus rapidement importants. » De son côté, Jean-Matthieu Biseau, PDG d'Opteven, qui compte par exemple plus de 1 000 dépanneurs pour des véhicules classiques, mais seulement 250 pour les versions électriques, estime que « c'est un mode de transport très urbain, et les besoins des propriétaires sont différents, ce qui peut aussi être la voie à d'autres services ».
Concernant les véhicules électriques, on pensait vraiment que les volumes de vente seraient plus rapidement importants.
Dan Assouline, PDG de Mondial assistance France
Valoriser les technologies embarquées
Autre point d'attaque, les nouvelles technologies embarquées. Soit les voitures sont équipées pour émettre et recevoir des données, soit le conducteur dispose tout simplement d'un smartphone sur lequel il trouve des applications qui lui permettent d'être géolocalisé. L'idée est de simplifier la relation avec son réseau de prestataires, donc de gagner du temps en réduisant le circuit du secours. IMA propose un dispositif qui peut être installé à bord de tout véhicule. Il permet un déclenchement volontaire ou automatique d'un appel d'urgence et la mise en liaison vocale avec les services compétents (pompiers, Samu, police, gendarmerie). En un seul clic, le prestataire attribue les missions à ses chauffeurs. Durée d'intervention, raison de la panne et modèle du véhicule : des informations précieuses pour les constructeurs. Acta (avec Act'nGO) et Mutuaide Assistance automatisent également leurs processus d'intervention via l'application smartphone. « Le temps de prise en charge est divisé par deux », calcule Mathieu Bazin, responsable du développement commercial et marketing chez Acta. Mais le chemin pour généraliser cette technologie semble encore long (lire encadré p. 38) et pourrait s'accélérer si l'État vient à leur secours pour la rendre obligatoire.
Afin de continuer à gagner des parts de marché, certains acteurs vont tout faire pour sortir du lot en imaginant de nouvelles couvertures. Axa assistance, qui a signé un contrat avec GoodYear en Inde, commence à aller en périphérie de l'assistance classique avec son produit pneu. L'achat est accompagné d'une assistance crevaison et du remboursement du pneu abîmé, ce qui peut constituer en parallèle un revenu supplémentaire pour le constructeur. Acta, créé en 1992 par des Automobiles Clubs européens pour venir au secours de leurs membres partant en vacances en voiture à l'étranger - lesquels sont moins nombreux aujourd'hui à le faire -, a décidé de se tourner vers les flottes d'entreprises, et surtout les poids lourds, dont les coûts de dépannage demeurent pour l'instant très importants, car ils ne sont pas encore standardisés.
Outre l'innovation, remettre en cause l'organisation peut engendrer des gains. Pour continuer à enregistrer de la croissance, des assisteurs réorganisent leurs plates-formes téléphoniques. Ainsi, Axa assistance a choisi de répartir son activité sur Barcelone pour l'Afrique et l'Europe, et bientôt Mexico pour l'Amérique : l'organisation ne se fait plus par pays, mais par zone géographique. Mondial assistance a aussi revu ses grandes familles d'activité. De son côté, Opteven a créé un plateau international capable d'intervenir sur des marchés étrangers, allant jusqu'à intégrer des mécaniciens italiens à l'équipe lyonnaise. Mais, pour ce faire, il doit convaincre le client, lequel n'est pas toujours prêt à laisser des chargés d'assistance du bout du monde prendre en charge des demandes locales.
L'autre activité historique concer-ne le voyage. Malgré un chiffre d'affaires en hausse de 4,2 %, à 297 ME, l'assistance rapatriement et l'assurance perte de bagages ou annulation séjour ont ralenti en 2011. Le nombre de dossiers traités pour l'assistance voyage a reculé de 2,5 % par rapport à 2010, avec 199 400 interventions.
Certaines agences se livrent à l'exercice illégal d'une activité d'assurance et s'exposent aux peines prévues par la loi.
Jean Bigot, spécialiste en droit des assurances
Toucher le public le plus large possible
En cause : les secousses politiques dans les pays arabes et le prix élevé du pétrole, qui grignote les marges. En réponse, les assis-teurs développent différentes manières de toucher un public le plus large possible : les offres liées aux cartes bancaires présentent des perspectives intéressantes. Mutuaide estime par exemple que son activité est portée par le voyage grâce à ces nouveaux contrats cartes bancaires signés avec les groupes Crédit agricole, LCL et Banque Carrefour.
Enfin, la dernière tendance consiste à faire des entreprises un important prescripteur. Comment ? Via, par exemple, les « offres mobilité » destinées aux expatriés ou aux salariés envoyés en mission. Avec, pour la mise en oeuvre, un partenariat avec des sociétés de veille économique et politique. Axa assistance, Europ assistance et Mondial assistance ont signé respectivement avec Geos, Crisis Consulting et Risk et Co. Plus récemment, Allianz Global Assistance, numéro un mondial de l'assurance médicale, a signé avec Coverseas, et Mutuaide avec Sécurité sans frontières. L'objectif étant de coupler la réactivité d'un rapatriement et la connaissance des risques politiques. Mais, là encore, cela reste, pour l'heure, la loi du petit nombre.
LE CHIFFRE
- + 64% L'évolution du chiffre d'affaires d'Allianz Global Assistance en Chine en 2011 par rapport à 2010, grâce à l'activité auto.
LA TECHNOLOGIE EMBARQUÉE...DANS UN DÉBAT
- Le e-call (e comme emergency, « urgence »). Ce système automatique de déclenchement d'alarme pourrait équiper tous les nouveaux véhicules en 2016. Reste à trouver un accord sur l'arrivée de l'appel : le 112 ou les plates-formes des assisteurs ? Les avis des différents intervenants - pays, opérateurs, assisteurs, fabricants automobiles, sociétés d'autoroutes - divergent. Le Syndicat national des sociétés d'assistance (SNSA), en accord avec l'avis des autorités françaises, réitère son attachement à la liberté de choix de l'interlocuteur. Un rapport montre que les e-calls sont constitués à 95% d'appels de demande d'assistance et seulement 5% pour des situations d'urgence. Si le 112 est choisi, le risque serait de saturer les centres de traitement des alertes des services publics avec des appels annexes. L'idée serait que le propriétaire de la voiture choisisse lui-même son assisteur, sans se voir imposer un numéro de téléphone par la réglementation.
Voyagistes : l'auto-assurance, une pratique illégale
La vente de voyages, qui est devenue très concurrentielle ces dernières années, notamment en raison du développement d'Internet, devient un marché difficile pour les assisteurs. Outre le fait que les clients sont de mieux en mieux informés, qu'ils mesurent davantage la part du risque et que l'année 2011 a été marquée par une diminution des séjours dans les pays arabes touristiques, un autre motif est venu s'ajouter au ralentissement de l'activité. En effet, depuis deux ans, certains courtiers distributeurs rencontrent de plus en plus de tour-opérateurs, souvent en difficultés économiques, qui proposent des garanties d'assurance annulation de voyage sans assureur, c'est-à-dire en auto-assurance. Si le contexte tendu pour les professionnels du voyage peut expliquer cette pratique, « elle pose un problème de légalité et de concurrence déloyale entre ceux qui auto-assurent leurs clients et ceux qui respectent la loi et vendent ces contrats d'assurances voyages via des assureurs dûment agréés », résume Arnaud Gérard, président du courtier grossiste en assurance Assur-Travel. Le client, pour sa part, n'y verrait que du feu, puisqu'il est amené à signer un contrat où figurent des garanties classiques. De son côté, l'agence - qui veille à ne pas utiliser le terme d'assurance - encaisse les souscriptions (entre 30 et 50 € en moyenne par voyageur, selon l'Écho touristique) et rembourse avec ses propres deniers en cas de problème en pariant sur l'absence d'un sinistre massif.
Un risque juridique important
Bien sûr, la garantie d'annulation voyage n'a rien d'obligatoire. Mais si le client ne la prend pas, et qu'il vient à annuler le voyage, « il est redevable d'indemnités [pénalités] contractuelles qui seront déduites du remboursement du prix du voyage par le voyagiste », précise, dans un avis, Jean Bigot, spécialiste en droit des assurances. Surtout, les agences qui proposent une garantie dont elles portent elles-mêmes le risque « se livrent à l'exercice illégal d'une activité d'assurance et s'exposent aux peines prévues par la loi » qui peuvent aller jusqu'à la fermeture définitive de l'établissement, une amende de 75 000 € et/ou un emprisonnement de trois ans contre le dirigeant. Le professeur émérite précise également que « l'Autorité de contrôle prudentiel [....] serait en droit de saisir le procureur de la République, aux fins de poursuite ». Ce cas, observé chez les petites agences par les courtiers, est loin d'être généralisé. Les commissions que les agences, petites ou grosses, touchent en vendant les assurances annulations des assisteurs, restent intéressantes : sur une prime de 10 €, de 4 à 6 € iraient à l'agence. « En réalité, l'assurance voyage est donc une activité peu rentable pour les assisteurs », confie l'un d'eux.
LES VENTES DE VOITURES ÉLECTRIQUES ONT DU MAL À DÉCOLLER
- Pour certains, seule une action des pouvoirs publics sur la réglementation, la taxation ou les incitations fiscales fera avancer le sujet. Pour d'autres, c'est aux constructeurs de proposer une distribution massive de voitures propres en concession. Suivant les prévisions réalisées par les constructeurs de voitures électriques, ce secteur pourrait représenter 15% des ventes de voitures neuves en 2020 sur le marché français (qui s'élève à environ 2 millions d'unités vendues par an). Pour les assisteurs, le coût est encore lourd, car il implique plus de prestations. Ainsi, on ne peut pas réparer la voiture sur place : il faut la déplacer, vers des concessionnaires spécifiques.
Des plateaux réorganisés
- Conséquence des orientations stratégiques, l'organisation des plates-formes a été modifiée. Exemple, Mondial assistance s'est spécialisé par domaine de compétences. Ainsi, l'automobile est très segmentée : un département France pour les assureurs, un autre pour les constructeurs, un troisième pour l'international. Pour l'assistance de proximité, les plates-formes sont divisées entre les services à la personne, les services pour l'habitat, la conciergerie. « Nos métiers des services à la personne et de l'habitat ont pris de l'ampleur du fait de notre développement », précise le groupe. - Chez Europ assistance, les nouvelles technologies ont eu une incidence sur l'organisation des plateaux, notamment en auto, avec les solutions de télématique embarquée, la géolocalisation ou le missionnement automatique des dépanneurs. C'est aussi le cas dans le domaine des services à la personne avec les nouveaux systèmes de relation à distance via Internet.
LES NOUVEAUX CLIENTS GAGNÉS EN 2011
- Inter mutuelles assistance
Sixt, Car Garantie, Suravenir assurances, Verspieren, Renault Trucks, Rhodia, SPB, Mutuelle de la RATP, Alstom, Groupe Lafarge, AttijariWafa Bank Europe, Internauto et Coris (Espagne), NCI (Royaume-Uni), Viasat et Arca Assicurazioni (Italie), Abacus (Allemagne), Eurocross (Benelux).
- Europ assistance
Voyages-sncf.com, Teldar Travel (centrale de réservations hôtelières), Thello (opérateur ferroviaire privé), TourCom, Ailleurs, Exotismes, Havanatour, Fiat Group (Fiat, Fiat Professional, Abarth, Jeep, Alfa Romeo, Lancia, Chrysler et Ducato Camper), Suzuki Moto, Saga Service, France moto assurances (FMA) et FMA Risk, Autolib, MIA Electric, Avis Budget Group, Système U, Nexity, Roland-Garros, Metlife. * Périmètre Icare : Hyundai i-Best, Cetelem (pour le produit Protexxio Entretien), Citroën Select, GMAC Banque, Toyota occasions.
- Fidélia assistance
Mairie de Paris, Pavillon prévoyance, LMG Corse, Prévoyance mutualiste d'Ile-de-France (PMIF), Véhicules sans permis (VSP), EDF Trading Logistic, Fédération française du sport universitaire, Fédération d'athlétisme, MAN camions et bus SAS. - Axa assistance Alliance Renault-Nissan (sur le véhicule électrique en Europe), RCI Renault, Europcar, Blue Cross Blue Shield Association, GoodYear Inde.
- Mutuaide assistance
Groupe Crédit agricole, Crédit mutuel Arkea, Carrefour banque (pour les cartes bancaires), les équipes françaises des jeux Olympiques de Londres.
- Opteven
Suzuki (pour l'automobile), ALD (véhicules électriques).
- Filassistance international
LCL, Groupe Humanis (Radiance et Vauban-Humanis).
- Ressources mutuelles
assistance Eovi mutuelle et Myriade (Eovi groupe), Apreva, Santévie, Identités mutuelle, SMT, Les Mutuelles ligériennes.
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