La voiture autonome agite les assureurs
Moins de sinistres, moins d’assurances individuelles de biens : la voiture sans chauffeur interroge les acteurs de l’IARD qui craignent de n'assurer, d'ici 10 ans, que la RC d'entreprises (constructeurs, plateformes...). Débats.

C’était, avec la nouvelle directive distribution d’assurance, LE sujet des derniers rendez-vous de Roam, le 26 janvier 2017, l’événement annuel de l’association des organismes d’assurance mutuelle. Il faut dire que la conduite autonome pourrait rebattre les cartes du marché de l’assurance automobile d’ici 10 ans. L’ex-syndicat jugeait donc bon d’en parler dès maintenant en invitant un constructeur très en pointe sur le sujet : Volvo. « Le coup de la conduite autonome est parti d’un point de vue technologique, confirme Yves Pasquier-Desvignes, président de Volvo France (lire ici l'interview réalisée par l'Argus en janvier 2016). Reste juste à obtenir l’acceptation du conducteur ». Le débat est donc là et non plus sur la faisabilité et fiabilité technologiques des systèmes de conduite autonome. « On s’engage à dire que les voitures seront autonomes en 2021 », affirme Yves Pasquier-Desvignes. Reste aussi la convention de Vienne qui contredit la possibilité technologique, le chauffeur devant rester maître de son véhicule en toute circonstance. Mais l'évolution du droit bouge, et ce paradoxe règlementaire pourrait rapidement être levé.
Baisse de 90% de la sinistralité
Pseudo-robots, les véhicules haut de gamme vendus en concession sont qualifiés de semi-autonomes. Allianz baisse déjà le montant des primes de leurs propriétaires, estimant que la conduite assistée se traduit par une diminution des probabilités de sinistres. « Si seuls les clients aisés peuvent acheter ce type de voitures, un scénario récent estime que cela réduirait juste le parc automobile de 1,5% avec une baisse de 20% de la sinistralité », explique Philippe Roche, directeur associé de l’agence Acommauto. Si, en revanche, cette typologie de voiture entraîne un développement du partage automobile au détriment de la propriété, la baisse du parc atteindrait 50% ! Et la sinistralité chuterait drastiquement de 90% ! « C’est pourquoi les assureurs doivent se préparer à devenir des assureurs de mobilité », réagit Malek Semar, dirigeant de la start-up Glob (un assistant de conduite).
Les assureurs devront toujours couvrir la RC
Représentant de la profession, Stéphane Désert, directeur général de la Mutuelle de Poitiers Assurances se montre positif : « c’est pour nous un grand bol d’air, cette innovation, et nous sommes conscients que de propriétaire, l’assuré automobile est appelé à devenir l’utilisateur d’un service ». Des navettes sont d'ailleurs en test entre le pont d’Austerlitz et la gare de Lyon à Paris. Le sujet n'a rien de fictif. Un challenge en terme de transformation pour cette mutuelle puisque 40% de son activité concerne la couverture des 4 roues. Face à la baisse inexorable de cette matière assurable, Stéphane Désert se prépare à ce que l’économie du contrat d’assurance change. « On s’intéressera plus au profil du véhicule qu’au profil du conducteur ». Mais comme la responsabilité demeurera, ce dirigeant estime que les besoins de garantie (RC, dommages, bris de glace, incendie…) resteront entiers. Car avant que le robot puisse être jugé coupable, il y a encore du chemin. « Le consommateur n’a aucune tolérance vis-à-vis d’une machine, elle n’a pas le droit de faillir si elle veut le remplacer », glisse Yann Arnaud, directeur pilotage et performance du pôle assurance dommages de Macif et président de GT véhicules connectés à la FFA.
Vers un marché BtoB de réassureurs?
Difficile encore de savoir quelles alliances industrielles se mettront en place et à quelle échéance : les opérateurs de systèmes, les constructeurs ? Les gafa ? Si le marché devient BtoB au sens où l’assureur couvrirait une marque automobile ou une plateforme de partage de véhicules plutôt qu'un particulier, l’étendue du risque serait telle que le marché passerait possiblement aux mains des réassureurs. « Nous maintiendrions la RC et la couverture des dommages en alliance avec les constructeurs », explique Stéphane Désert qui se préparer à indemniser moins de tôles froissées, mais à proposer plus de protection juridique. Confirmation d’Alain Bensoussan, avocat en droit numérique. « Le monde de demain sera un monde encore plus assurantiel en raison des croissances en masse de la cyber fraude et des risques sériels ». Le marché des robots remplacere, selon lui, celui de l’accident routier et « sera un très grand marché ».
Assureur des droits de l'homme de l'intelligence artificielle
Qui eût cru que les droits de l’homme de l’intelligence artificielle constituerait un business juteux pour l’assurance ? Aux dernières rencontres de l’Amrae (Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise) à Deauville, le 3 février 2017, Christian Ledoux, directeur véhicule connecté et services de mobilité de Renault-Nissan en était convaincu. « Le système auto-apprend en conduisant, comme la Google Car le démontre, et nous sommes donc à la veille d’une révolution automobile ». Pour lui, en 2020, toutes les voitures seront des smartphones à 4 roues. Et le parc pourrait bien chuter, en effet, de 60%, les sociétés de VTC comme Uber remplaçant déjà souvent la seconde voiture du foyer. Et de fait, les problèmes de cyber-sécurité et de data privacy seront, pour cet industriel, des sujets assurantiels maîtres pour les compagnies, mutuelles et bancassureurs. A bon entendeur...
SUR LE MÊME SUJET
Base des organismes d'assurance
AbonnésRetrouvez les informations complètes, les risques couverts et les dirigeants de plus de 850 organismes d’assurance
Je consulte la baseLa voiture autonome agite les assureurs
Tous les champs sont obligatoires
0Commentaire
Réagir