Construction : la crise a fait déraper la sinistralité
Alors que l'embellie du secteur de la construction semble se confirmer, la mutuelle d'assurance SMABTP (groupe SMA) dresse un bilan plutôt inquiétant de l'évolution de la sinistralité depuis le début de la crise en 2008. Explications.

A elle seule, l'année 2016 a été une des plus coûteuses pour SMABTP. la mutuelle d'assurance spécialisée dans la construction a, en effet, ouvert 107 000 sinistres représentant une charge totale de 648 M€ ... Et elle a encore plus de 3 Md€ de sinistres en cours. Si le nombre de dossiers est resté plutôt stable, globalement, sur la période, à savoir -14% pour les sinistres en cours de chantier (TRC, RC, RC PRo) et +13% pour les sinistres après réception (Dommages Ouvrage et décennale), en revanche, la charge des sinistres a grimpé de 56% en 8 ans ! « Plus que la fréquence, c'est surtout l'intensité des sinistres qui s'est accentuée durant la crise », explique Pierre Esparbès, Directeur Général délégué de SMABTP.
En décennale, leur coût moyen a ainsi bondi de 24%, soit une croissance frôlant les 3% par an. « En 2008, un sinistre après réception coûtait en moyenne 3 600 euros, il en coûte 4 500 euros aujourd'hui », illustre Bertrand Lotte, directeur des règlements de SMABTP. Alors que la part de marché de l'assureurs est proche de 30%, sa sinistralité peut être considérée comme un échantillon révélateur de la situation du marché...
Des marges faibles et plus de sous-traitance
En cause, plusieurs facteurs : tout d'abord, la crise elle-même et les baisses de mises en chantier entre 2009 et 2015, qui ont tiré les prix vers le bas (ndlr : en 2016, avec près de 400 000 logements neufs construits, le marché est reparti) et entraîné une concurrence accrue entre les entreprises, avec érosion des marges et recours à une sous-traitance engendrant une baisse sensible de la qualité. « Parallèlement, les entreprises se sont concentrées sur l'obtention de nouveaux marchés, diminuant leurs efforts en matière de service après-vente et de suivi des chantiers. La défaillance de certaines d'entre elles n'ont pas permis aux assureurs de recouvrer la franchise préfinancée dans la responsabilité décennale obligatoire » explique Pierre Esparbès.
Une judiciarisation des dossiers
Egalement pointée du doigt, une hausse des conflits entre entreprises et maîtres d'œuvre ainsi qu'un réel changement de comportements de ces derniers, qui n'hésitent plus à ouvrir des dossiers en contentieux, alors qu'ils réglaient jusqu'ici leurs litiges à l'amiable.
« On assiste à un accroissement du nombre de réclamations pour des préjudices immatériels (décalage de planning, désorganisation de chantier, surcoûts...), et à une augmentation des demandes contentieuses directes ou dans les premiers mois d'instruction des dossiers », constate Bertrand Lotte. Avec, pour principale conséquence pour l'assureur, une hausse des frais d'instruction, sous l'effet de la multiplicité des réunions d'expertises... En RC, le taux de contentieux en 1ère année est ainsi passé de 4,5% en 2008 à 12% en 2016, quand le nombre de sinistres contentieux en décennale a cru de 37% depuis 2008.
Des évolutions technologiques mal maîtrisées
Enfin, sur les 10 dernières années, l'impact des normes thermiques et les évolutions technologiques ont porté à la hausse les coûts de construction et par voie de conséquence le coût des travaux de réparation des ouvrages, impactant directement les assureurs. Parmi les préconisations émises par la SMABTP pour faire face à cette dérive globale de la sinistralité, la responsabilisation des acteurs est une des pistes avancées. « Elle pourrait prendre à terme la forme d’un renforcement des exigences en terme d’assurance pour les fabricants de procédés et les sous-traitants », avance Pierre Esparbès.
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