Pourquoi l'Italie attire Axa
DOMINIQUE MURET, À MILAN
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DOMINIQUE MURET, À MILAN
Les manoeuvres d'Axa en terre italienne n'en finissent pas d'intriguer. La semaine dernière, le « Corriere della Sera » a révélé que le géant français de l'assurance détenait 1,97 % de la banque d'affaires Mediobanca, incontournable institution financière possédant d'importantes participations au sein de grandes entreprises italiennes... comme la compagnie d'assurances Generali, adversaire européen du Français. Mediobanca en est en effet l'actionnaire majoritaire avec 14 % du capital et a toujours été considérée comme un cheval de Troie capable de pénétrer la forteresse de Trieste.
Une opération très discrète
Or, dans cette affaire, Axa a agi avec une grande sobriété. Selon une source bancaire, sa prise de participation dans Mediobanca n'est pas récente. Elle a été réalisée par l'intermédiaire de Colisée Excellence, une discrète société financière du groupe, et le Français s'est bien gardé de dépasser le seuil de 2 % qui rend obligatoire une communication à la Consob, l'autorité boursière italienne. D'ailleurs, Axa n'a pas souhaité faire de commentaires sur ses participations « non stratégiques ».
Reste que les Italiens s'interrogent sur ce qui a bien pu décider le colosse français à investir 240 MEdans cette banque d'affaires milanaise... D'autant que dix jours avant, Henri de Castries avait confié ses ambitions dans la péninsule au quotidien « Finanza & Mercati » : « Notre société est encore trop petite en Italie. L'objectif est de faire des acquisitions quand et si se présentent de bonnes occasions. » Présent dans la Botte depuis 1993 avec 1 274 employés dans 7 sociétés et un CA de 1,8 MdE, Axa n'a en fait jamais réussi à y décoller. Pourtant, selon Henri de Castries, « les choses sont en train de changer dans ce pays qui s'ouvre davantage au contexte international », offrant ainsi des opportunités aux groupes étrangers. « Ce pourrait être le moment propice, confirme un analyste du secteur. Le capitalisme italien est en pleine mutation. Récemment, deux banques étrangères, la Néerlandaise ABN Amro et l'Espagnole BBVA ont lancé une OPA sur deux banques régionales, Banca Antonveneta et la Banca Nazionale del Lavoro (BNL), tandis que l'Italien Unicredito s'est emparé du groupe bancaire allemand HVB à travers une participation croisée. Pourquoi ne pas imaginer le même scénario entre Axa et Generali ? De même, un entrepreneur immobilier, Stefano Ricucci, s'est lancé à l'attaque du puissant groupe éditorial Rizzoli-Corriere della Sera (RCS), montrant ainsi que les pactes d'actionnaires, chargés un temps de verrouiller le capital des entreprises les plus stratégiques, ne sont plus aussi rigides. »
D'autres entrepreneurs immobiliers se sont invités au capital de Mediobanca, tout comme le Crédit lyonnais. Mais celui-ci a perdu de son ancien pouvoir sur le capitalisme transalpin. Toutefois, à moins qu'Axa ne s'allie avec d'autres Français tels Dassault, Groupama et Vincent Bolloré, déjà présents dans son capital à hauteur de 10 %, il y a peu de chances que l'assureur mette la main sur Generali. « Vu la capitalisation en Bourse du groupe de Trieste, à plus de 33 MdE, et le prix actuel de son titre, à plus de 25 E, il me paraît exclu qu'Axa tente de s'en emparer, indique Enrico Mattioli de Kepler. Paradoxalement, avec son actionnariat diffus, Generali constitue la meilleure proie dans ce secteur, mais les résistances, notamment politiques, sont encore très fortes. Les Italiens ne sont pas près de lâcher le morceau. »
Une bataille historique
« La dernière et unique grande acquisition par un groupe étranger en Italie dans le secteur des assurances remonte aux années quatre-vingt, lorsque l'Allemand Allianz prit RAS », rappelle Adriano Bonafede, auteur du livre « Malus malus, processo alle assicurazioni » (« Malus malus, procès aux assurances »). « Aujourd'hui, qui veut pénétrer notre marché doit y mettre le prix. On ne fait plus d'affaires en Italie. L'affaire, c'est de pouvoir se permettre la péninsule ! Dans ce contexte, l'unique grande multinationale italienne du secteur, Generali, me semble hors de portée. Il faudrait vraiment que les Français se lancent dans une bataille historique. » Reste Toro, filiale du groupe De Agostini. D'aucuns prétendent que si Axa en offrait un bon prix, l'éditeur italien serait prêt à la céder...
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