Les (ré)assureurs vie s’éveillent à la dématérialisation

Transfert de risques, services (souscription, sélection, tarification...) et optimisation du bilan et du capital : tel est le tiercé de tête des besoins des cédantes en matière de réassurance vie sur les risques biométriques (mortalité, longévité, incapacité-invalidité…). Une enquête menée par le cabinet de conseil britannique NMG sur les marchés français et européen, et confiée en exclusivité à L’Argus, le confirme. Un podium savamment entretenu à la fois par la réglementation (Solvabilité 2), mais aussi par les contraintes de marché (développement de produits, diversification, relais de croissance en dehors de l’IARD ou de la santé collective...).
En face, dans un environnement de marché où les perspectives de croissance de la réassurance vie s’avèrent limitées (+3 % en Europe de l’Ouest en 2016), les réassureurs – principalement mondiaux (Scor, RGA, Swiss Re...) – exploitent depuis plusieurs mois le levier de la dématérialisation des services à l’instar des plateformes automatisées de souscription ou de distribution. L’objectif est double. Pour la cédante d’une part, ces plateformes simplifient les procédures de sélection de risques, réduisent les délais de vente de façon à éviter la déperdition et diversifient les canaux de distribution. Pour le réassureur, d’autre part, l’automatisation vise à accroître le potentiel de fidélisation et, in fine, le volume de primes cédées. Reste qu’à la différence des marchés anglo-saxons, les taux de pénétration de tels systèmes en France demeurent faibles. Signe que les assureurs vie cherchent encore à éprouver et « challenger » les offres existantes.
L’accès aux services, principale motivation des acheteurs
Transférer ses risques pour protéger son bilan reste le premier facteur déclencheur de l’achat de réassurance traditionnelle en vie, en France (84 %) comme dans le reste du Vieux Continent (86 %). Depuis quelques années, les cédantes continuent d’accorder une attention particulière à l’offre de services du réassureur. La palette proposée s’avère large : de la plateforme de sélection des risques, à l’aide à la tarification ou à la distribution de produits en passant par la prévention ou le marketing direct. Les exemples ne manquent pas sur le marché. Scor Global Life propose ainsi à sa clientèle belge et française l’appui de sa filiale Réhalto, en matière de risques incapacité et invalidité. Elle intervient notamment dans le cadre de la prévention de l’absentéisme au travail. La réassurance de services peut aussi s’entendre
d’un point de vue financier, orientée dans la gestion de la solvabilité et du capital des cédantes. Solvabilité 2 agit comme un catalyseur de la demande en réassurance vie. En Allemagne, 50 % des assureurs envisagent de revoir leurs programmes dans les douze prochains mois, notent les auteurs de l’étude. Un chiffre qui tombe à 20 % en France. « En France, la structure de la demande de réassurance va croître avec Solvabilité 2. Pour l’instant, toutefois, les résultats ne démontrent pas de changement de positionnement du marché ni de croissance des primes de réassurance. Très peu d’affaires ont été conclues en France, mais les réassureurs commencent à envisager de proposer des solutions », précise Paul Ernest, analyste réassurance au cabinet NMG.

Le prix, mais pas seulement...
La compétitivité tarifaire ressort comme le principal facteur de sélection d’un réassureur en France (85 % des sondés) là où, pour les autres assureurs présents en Europe, le rating (solidité financière) constitue une exigence minimale. Viennent ensuite l’esprit de partenariat et l’expertise de souscription au-delà du seul partage de sort. Les principaux opérateurs du marché européen à l’instar de Scor, Munich Re, RGA, Swiss Re et Hannover Re ont d’ailleurs engagé des dépenses d’investissement pour moderniser leurs outils. RGA dispose de sa propre plateforme automatisée de souscription, baptisée Aura. Le réassureur vie revendique près d’une cinquantaine de clients. Depuis juillet 2015, Swiss Re s’est doté d’une plateforme d’aide à la distribution en ligne de produits vie et santé à destination des cédantes, en complément de Magnum, son système de souscription automatisé. Ce mouvement répond également à des besoins de développement. En France, les réassureurs vie misent beaucoup sur la loi Hamon et la résiliation de l’assurance emprunteur pour capter des affaires nouvelles auprès des assureurs susceptibles de commercialiser une offre individuelle. « L’assurance emprunteur constitue une opportunité de marché avec un essor des offres individuelles alternatives, pour lesquelles la simplicité et la rapidité de réponse et donc la dématérialisation constituent un facteur-clé de succès » souligne Gilles Thivant, directeur des marchés France et Afrique de Scor Global Life. Pour y parvenir, l’entité vie du réassureur compte s’appuyer sur son service d’e-sélection (par téléphone et, depuis fin 2015, en ligne). Celui-ci intervient en marque blanche auprès de courtiers grossistes et assureurs en prévoyance et en emprunteur.

La France à la traîne sur la dématérialisation
Le taux de pénétration des systèmes automatisés de souscription auprès des cédantes reste faible en Europe, de l’ordre de 25 %, contre 83 % en Australie et 62 % au Canada. À quelques nuances près : « L’Espagne présente un taux d’adoption plus élevé qu’en Italie en raison du recours relativement courant à la télé-souscription par les bancassureurs en Espagne », observe NMG. En France, ces plateformes ne sont utilisées que dans 14 % des cas. Pire, 62 % des cédantes n’envisagent pas d’en évaluer la pertinence dans les prochains mois. Cette situation ne devrait toutefois pas durer si l’on en croit les auteurs de l’étude : « Les taux de pénétration semblent appelés à augmenter en France, en partie du fait de la demande croissante de solutions automatisées pour l’assurance emprunteur ». Outre une réduction des coûts, les cédantes cherchent à accéder à des canaux de distribution plus efficients : « Les systèmes automatisés d’e-sélection et de télé-sélection accélèrent le processus de sélection médicale, en permettant une souscription totalement dématérialisée, tout en renforçant la relation avec le client », explique Jeremy Speed, chef de projet e-sélection chez Scor Global Life.

Méthodologie
L’enquête a été réalisée par NMG, cabinet de conseil britannique en assurance, réassurance et gestion d’actifs, en décembre 2015, auprès de 294 compagnies d’assurance implantées dans 12 pays européens dont 36 pour la France.
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