SIX JOURS POUR SAUVER LA CGA...Liquidation Le transfert d'office du portefeuille de la mutuelle sanctionne un manque de fonds propres et de nombreuses erreurs stratégiques et de management. Et les candidats à la reprise ne se bousculent pas.
SIX JOURS POUR SAUVER LA CGA...
Liquidation Le transfert d'office du portefeuille de la mutuelle sanctionne un manque de fonds propres et de nombreuses erreurs stratégiques et de management. Et les candidats à la reprise ne se bousculent pas.
Chronique d'une mort annoncée. Cette formule résume l'histoire récente de la CGA, cette mutuelle nantaise que vient frapper une décision sans appel de la Commission de contrôle des assurances (CCA). Le 20 décembre, le régulateur a en effet demandé un transfert d'office du portefeuille. La mesure a été rendue publique le 1er janvier par le " Journal officiel ". Cette procédure s'apparente à un appel d'offres. Mais les assureurs candidats doivent se manifester avant le 15 janvier, et les bonnes volontés ne se bousculent pas au portillon. Groupama a examiné le dossier début décembre, mais n'a pas donné suite. Pendant l'été, Zurich avait passé un " accord structurant " avec la CGA, permettant notamment aux agents de la mutuelle nantaise de distribuer ses produits vie. Mais Zurich a reculé devant les 15 M€ dont la CGA a besoin pour reconstituer ses fonds propres. Une somme qui fait aussi réfléchir les assureurs de la Roam. La mutuelle de Poitiers, par la voix de Maxime-Henri Désert, son directeur général, ne veut pas puiser dans ses réserves. Aréas-CMA estime, de son côté, que le réseau d'agents de la CGA n'est pas assez fidèle pour justifier un investissement risqué. Enfin, aucune solution collective ne se profile. " La Roam a fait beaucoup d'efforts pour aider au redressement de la CGA, sans résultat ", explique et regrette Patrick Peugeot, qui préside cet organisme. Rarement une société de cette taille (lire ci-contre) a concentré un tel faisceau de regards hostiles. Pourtant, le bilan de la CGA ne motive pas une telle attitude. Le portefeuille fait la part belle aux assurances dommages du particulier et comporte une proportion importante de contrats santé. Alors, où est le problème ?
Hésitations fatales
Un proche du dossier évoque de considérables " erreurs de gestion " : investissements malheureux en Bourse, diversification tout aussi maladroite de la souscription, dont la participation à un pool aviation. La CGA serait même engagée sur de gros sinistres - peut-être celui du World Trade Center - et devrait des sommes importantes à Axa. La présence en assurance construction inquiète depuis longtemps. Mise sous étroite surveillance par la CCA depuis 1997, la CGA n'aurait pas pris de mesures pour réduire ses engagements. Les observateurs pointent aussi un niveau de frais généraux élevé. Mais le reproche le plus fondamental porte sur le management, " qui ne cesse d'hésiter. La stratégie manque de visibilité ", formule un assureur. En effet, depuis 1997, date de l'arrivée de l'actuel directeur général, Christian-Huygues Despointes, la CGA a passé de nombreux accords. La société italienne La Cattolica, Monceau, La Caisse d'épargne des Pays de Loire, Zurich ont consenti des prêts importants et envisagé un rapprochement. En vain, et la solitude est aujourd'hui chèrement payée. Car la mutuelle a dû prendre de coûteuses protections auprès de certains réassureurs. Elle a aussi placé quelques risques auprès de partenaires fragiles, comme les affaires transport à la Mutuelle électrique, mise récemment en liquidation (lire p. 11). Ces tentatives avortées expliquent l'absence, pour le moment, de candidature au sauvetage de la mutuelle. Une dernière explication réside dans la réputation du réseau d'agents. Managé de manière peu dynamique et peu transparente, celui-ci n'inspire pas confiance. En revanche, pris isolément, les agents CGA représentent parfois de réelles belles affaires. Ils commencent déjà à approcher de nouveaux mandants, pour sauver leur exploitation et protéger leurs clients. L'intérêt des assurés est aussi le souci premier de la CCA. Elle appréciera les candidatures à la reprise à l'aune de leur solidité financière. Si aucune ne se manifeste d'ici au 15 janvier, la CGA se verra retirer ses agréments, les actifs seront réalisés et les créanciers honorés, par ordre de privilège. Ce sont 172 salariés qui risquent de perdre leur emploi et 115 agents leur indemnité compensatrice. Quant aux assurés, ils pourraient peut-être se voir indemnisés par le prochain fonds de garantie dommages, dont la création est prévue par le projet de loi sur la sécurité financière. Manifestement, la faillite de la CGA n'a pas fini de faire parler d'elle.
LA CGA EN CHIFFRES
ET POURTANT, LES FONDAMENTAUX SONT BONS
Cotisations 2001 : 89,9 M€.
Résultat : 184 000 €.
Capitaux propres : 14,1 M€.
Passifs subordonnés : 6,1 M€.
Ratio S/C : 61,2 %.
Provisions techniques : 115 M€.
Salariés : 172.
Agents généraux : 115, dont 34 mandats secondaires.
Composition du portefeuille : 50 % automobile, 25 % MRH, 25 % autres risques, dont la santé, la construction et les risques professionnels.