100% Santé : l'exécutif s'échauffe sur le RAC 0
Une étude sur l’impact du 100 % Santé a créé la polémique. Contrairement aux affirmations du gouvernement, il n’y a jamais eu d’engagement des organismes complémentaires sur les tarifs.

L’ampleur de la polémique déclenchée par l’étude de Santiane au sujet de l’impact inflationniste du reste à charge zéro (Rac 0) sur les cotisations des organismes d’Assurance maladie complémentaire (Ocam) a surpris la profession.
Particulièrement alarmiste, l’étude du courtier en ligne affirmait que cette réforme provoquerait des hausses tarifaires de 7 % d’ici à 2021, et jusqu’à 9,5 % pour les séniors. Ce n’était pas la première étude du genre, mais sa publication dans le quotidien Le Parisien daté du 23 octobre, jour du début de l’examen en séance publique à l’Assemblée nationale du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2019, a fait office de caisse de résonance.
L’après-midi, au Palais Bourbon, la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, rappelait que « cette réforme est prise en charge aux trois-quarts par la Sécurité sociale et seulement un quart par les complémentaires santé ». Et d’ajouter que « les engagements ont été pris : le coût de cette réforme va être absorbé par l’augmentation naturelle des coûts des complémentaires ». Dans une intervention télévisée sur France 2, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, répétait que « les mutuelles se sont engagées à ne pas augmenter les prix » et les invitait à « respecter l’engagement pris avec l’État, faute de quoi le gouvernement prendrait ses responsabilités ». Sur France Info, la députée LREM de Paris Olivia Grégoire faisait monter la tension d’un cran en affirmant que l’on « peut aussi employer la coercition pour contraindre les mutuelles à ne pas augmenter leurs tarifs ».
« Cette étude, qui ne reflète l’opinion que d’un seul acteur de la place, ne justifie pas des réactions excessives, considère Bernard Spitz, président de la Fédération française de l’assurance (FFA). En réalité, la situation n’a pas changé depuis que nous l’avions évoquée avec la ministre de la Santé au printemps. Nous avons convenu alors avec les autres fédérations que le coût final du RAC 0 dépendra de multiples facteurs, et c’est pour cette raison que nous avons proposé un comité de suivi que Mme Buzyn a accepté. » De son côté, Thierry Beaudet, président de la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF), a eu « le sentiment qu’il y a eu un emballement qui n’est pas fondé. Certains ont perdu leur sang-froid. »
Pas d’engagement formel
Et pour cause : « Il n’y a jamais eu d’engagement de ne pas augmenter les cotisations. Les organismes complémentaires ne se sont engagés qu’à répercuter les hausses de cotisations le plus faiblement possible », rappelle Maurice Ronat, président de l’Union nationale des organismes d’Assurance maladie complémentaire (Unocam). Et il ne s’agit pas d’un engagement écrit.
« Le seul engagement que nous avons pris, c’est sur l’amélioration de la lisibilité des garanties », rappelle de son côté Jean-Paul Lacam, délégué général du Centre technique des institutions de prévoyance (CTip). Le dispositif pour rendre les contrats de complémentaire santé plus compréhensibles par les assurés, mis au point par les fédérations et déjà validé par le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), devrait être finalisé d’ici à la fin de l’année avec les pouvoirs publics. Pour le reste, M. Lacam reste prudent : « Je ne me hasarderai pas à faire le moindre pronostic. J’explique depuis le début que l’on ne peut pas apprécier l’impact du RAC 0 de manière macroéconomique. »
À ce jour, l’unique engagement écrit des Ocam sur le Rac 0 concerne la mise en œuvre de la réforme en dentaire, puisque l’Unocam a signé la nouvelle convention aux côtés de l’Union nationale des caisses d’Assurance maladie (Uncam) et de deux syndicats de chirurgiens-dentistes (CNSD et UD). Quant aux accords sur le Rac 0 en optique et pour les prothèses auditives, « ils n’ont pas fait l’objet d’une signature tripartite », rappelle Jean-Paul Lacam. Ils ont été signés en grande pompe par les pouvoirs publics et les représentants de ces professions au dernier congrès de la Mutualité française, en juin à Montpellier mais, malgré les appels du pied de Mme Buzyn, aucun mutualiste n’a figuré sur la photo de famille prise à cette occasion !
À la mise en cause des mutuelles, Thierry Beaudet répond que la réussite de la réforme « dépendra de la mobilisation de l’ensemble des acteurs concernés : les complémentaires santé bien sûr, mais aussi les pouvoirs publics s’ils décident de ne pas transférer de nouvelles dépenses aux mutuelles, et les professionnels de santé s’ils jouent le jeu et recommandent à leurs patients les équipements des paniers de soins à RAC 0. Nous devons tous prendre nos responsabilités. »
Augmentations… ou pas
Faut-il, après cet épisode qui peut en rappeler d’autres, comme les projets de « taxation des réserves des mutuelles » sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, craindre un regain de tension avec le pouvoir politique ? Bernard Spitz ne le pense pas : « Comparaison n’est pas raison. Nous sommes aujourd’hui dans une démarche positive et responsable entre les Ocam et les pouvoirs publics. Nous souhaitons rester fidèles à cette ligne de conduite. » « Cette polémique s’est déclenchée au moment où l’exécutif est chahuté par des questions de pouvoir d’achat, par la hausse des carburants… », relativise Jean-Paul Lacam. Il n’empêche. Sur le terrain, des réactions sont déjà perceptibles. Maurice Ronat, également président du groupe mutualiste Aésio, dit avoir déjà « eu dans des agences des assurés venus râler contre des hausses de cotisations ».
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