Faut pas pousser mémé...
François Limoge Rédacteur en chef adjoint
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François Limoge Rédacteur en chef adjoint

La France joue à se faire peur avec ses petits vieux. Ou, du moins, son gouvernement. François Baroin a ouvert le bal en déclarant qu'il faudrait trouver 30 Md€ pour financer la dépendance. « C'est du même ordre que la réforme des retraites », a insisté le ministre du Budget pour bien marquer l'ampleur du chantier lancé par le président de la République. Lors de son discours de politique générale, François Fillon a repris ce montant, après avoir rappelé que notre pays consacrait déjà 22 Md€ aux personnes âgées en perte d'autonomie. « J'ai été moi-même effrayé en découvrant ces chiffres », s'est exclamé Nicolas Sarkozy, lors de son intervention devant les maires de France.
Ces chiffres sont pourtant très discutables. Pas facile d'évaluer la dépense publique consacrée à la dépendance. Les 22 Md€, estimés par la Cour des comptes, recouvrent tout aussi bien l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) que les exonérations fiscales, l'action sociale des caisses de retraite, ou encore les dépenses de soins. La contribution de l'assurance maladie équivaut à près de 12 Md€. Elle finance notamment l'activité médicale des maisons de retraite, dont les pensionnaires ne sont pas tous dépendants - heureusement !
Les 30 Md€ prêtent encore plus à confusion. Tirés d'un rapport de 2006 du Centre d'analyse stratégique, ils correspondent à l'évaluation des coûts à l'horizon 2025 d'une couverture optimale de la dépendance. Et ce chiffre englobe bien évidemment les soins financés par l'assurance maladie. Même pour atteindre ce scénario idéal, il faudrait donc trouver environ 10 Md€ par an. Pas négligeable, mais rien à voir avec les 40 Md€ de déficit des régimes de retraite en 2020, selon les projections du Conseil d'orientation des retraites.
À écouter les discours depuis 2007, on avait cru comprendre que ce fameux cinquième risque était censé réduire le reste-à-charge des classes moyennes et anticiper l'arrivée au grand âge des papy-boomers. Le premier point relève pour l'essentiel de l'APA ou d'une éventuelle incitation à l'assurance dépendance. Concernant le second, de considérables progrès ont été faits. Dans certaines régions, comme en Languedoc-Roussillon, trouver un accueil pour sa mamie dépendante ne relève plus du parcours du combattant.
Alors pourquoi cette dramatisation ? Prépare-t-elle le terrain à des annonces difficiles ? Les départements sont, il est vrai, au bord de l'asphyxie, l'État n'ayant pas tenu son engagement initial de financer 50 % de l'APA. En tout état de cause, elle intervient après des propos plutôt contradictoires du président de la République, notamment sur la création d'une cinquième branche de Sécurité sociale, que le Premier ministre s'est bien gardé de confirmer. Autant dire que ce débat sur la dépendance n'est pas forcément bien parti...
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