Assurance vie : à quoi ressemblera la provision pour rendements futurs ?
Annoncée mi-octobre par Bernard Spitz, la création d’une réserve de stabilité pour les assureurs vie avance. Baptisée « provision pour rendements futurs » (PRF), ce dispositif contra-cyclique de place vise à lisser les rendements dans le temps face au risque d’un maintien durable des taux bas. Si elle fait l’objet d’un relatif consensus au sein de la profession, les débats se poursuivent quant au calendrier.

Le régulateur ne cesse de le marteler : dans le contexte actuel de taux bas, les assureurs vie doivent se constituer des réserves. Sandrine Lémery, première secrétaire générale adjointe de l’ACPR, rappelait dans nos colonnes que « créer des provisions contra-cycliques vise à protéger les assurés » ajoutant que « augmenter les provisions doit permettre de faire face au risque d’un maintien des taux bas sur le long terme, voire de remontée à un horizon déterminé, et donc de tenir dans le temps les engagements pris envers les assurés ».
Message reçu par les assureurs vie qui planchent actuellement sur la création d’une nouvelle provision.
Lisser les rendements dans le temps
Baptisée provision pour rendements futurs (PRF), elle aurait pour objectif de créer un mécanisme contra-cyclique permettant aux assureurs vie de pouvoir faire face à leurs engagements en euros pour les contrats d’assurance vie et de capitalisation et de permettre de servir des rendements attractifs même si les rendements financiers générés sur une année ne le permettent pas. Selon nos informations, une version de cette PRF, sous la forme d’une note technique, a été transmise par la Fédération française de l’assurance (FFA) au Trésor début novembre.
L’idée : pallier un scénario de remontée des taux après une longue période de baisse ne permettant plus de bénéficier des rendements élevés des anciennes obligations. « Cette mesure va dans le bon sens puisqu’elle permettra de disposer d’un outil qui apportera plus de souplesse aux compagnies et incitera le marché à se poser les bonnes questions entre autres sur la capacité de servir des rendements futurs », rappelait Jacques de Peretti, PDG d’Axa France, à l’Argus début novembre.
Une réserve en amont de la participation aux bénéfices
Première caractéristique de cette nouvelle réserve : elle serait comptabilisée avant la constitution de la participation aux bénéfices minimale des assurés (Article A. 132-11 C. assur.) avec pour effet donc de réduire la base de calcul de cette participation aux bénéfices (sauf pour les contrats décès). Une baisse qui serait compensée par la reprise ultérieure de cette nouvelle provision. « Créer une nouvelle réserve calculée en amont de l’affectation de la provision pour participation aux bénéfices est une disposition plus prudentielle que consumériste », remarque Guillaume Leroy, actuaire associé chez Prim’act. « Si un telle réserve devient obligatoire, elle permettrait aux assureurs vie de se dégager de la contrainte concurrentielle de distribution des taux de rémunération immédiate et non progressive ».
Précision toutefois, dans l’idée soutenue par les assureurs, cette provision ne serait aucunement acquise aux assurés (ni légalement ni contractuellement), contrairement à la provision pour participations aux bénéfices dont 85% au moins doivent être reversés aux épargnants. Et c’est là le problème : « Il s’agit clairement d’une entaille au mécanisme de l’assurance vie tel que défini contractuellement, en particulier sur les fonds euros. C’est une forme de spoliation de l’épargnant », confie une source.
Générer des rendements plus attractifs
Le PRF serait également plafonnée sur le modèle de la limitation prévue pour la provision collective de diversification différée créée lors de la mise en œuvre de l’euro croissance. Cette provision doit pouvoir être reprise pour pouvoir générer des rendements plus attractifs sur les fonds euros qui suivent une courbe en chute constante depuis plusieurs années. « Il faut bien garder à l’esprit que le système actuel a un peu dérivé avec le système de rémunération annuelle distribuée immédiatement. Il s’agit de redonner à l’assurance vie son caractère d’épargne de long terme », relève Guillaume Leroy.
Un décret en Conseil d’Etat
Un groupe de travail planche sur la faisabilité de cette nouvelle réserve qui nécessiterait de passer par un décret en conseil d’Etat et un arrêté modifiant le code des assurances pour sa mise en œuvre, ainsi qu’un ajustement du règlement de l’autorité des normes comptables applicables à la profession.
En outre, les assureurs militent pour la mise en place d’un dispositif spécifique de déductibilité fiscale.
Un calendrier irréaliste ?
Reste la question du délai de mise en œuvre de la PRF. Elle serait « difficilement applicable si elle devait être déployée en 2017 sur la base de l’exercice 2016 », selon cette même source, dans la mesure où les assureurs vie ont déjà, pour l’essentiel, acté l’utilisation de leur PB sur l’exercice écoulé.
A moins qu’elle ne serve, à court terme, les intérêts de quelques assureurs vie, encore préoccupés par la problématique des taux garantis, avant ceux de la place : « Il me semble qu’en l’état actuel, le dispositif profiterait d’abord à un gros acteur du marché. Cela arrange clairement certains et pas d’autres ».
Géraldine Bruguière-Fontenille et Sébastien Acedo
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