Les défis à venir du tiers secteur
Economie sociale Étienne Caniard

Les acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS) auraient-ils, pour paraphraser Romain Rolland, l'optimisme de la volonté et le pessimisme de la réalité ? La première édition des Rencontres des innovations solidaires (RIS), les 15 et 16 mars à Paris, a jeté un éclairage cru sur les défis et opportunités auxquels l'ESS est confrontée. Si elle recouvre des milieux aussi différents que le monde associatif, la grande distribution ou la banque, le secteur de l'assurance santé est sans doute le plus caractéristique de cet état de fait. Entre les transferts du régime obligatoire vers les complémentaires, la concurrence effrénée et la réduction des différences entre les acteurs, notamment du fait de la législation communautaire, les acteurs de l'économie sociale se retrouvent au pied du mur.
Libéralisation, banalisation, privatisation
« Le marché unique s'est construit en déconstruisant le tiers secteur. Aujourd'hui, il faut reconnaître son caractère distinctif », a affirmé Vincent Peillon. Le député européen a indiqué que le programme présidentiel du Parti socialiste reviendra sur le rôle de l'ESS, comme un pilier sur lequel s'appuyer. L'enjeu est autant économique (l'ESS représente deux millions d'emplois) que politique. Comme l'ont souligné plusieurs intervenants, le débat ne se limite pas à opposer économie sociale et marché, mais à sortir d'une « logique infernale », selon l'expression du président de la Mutualité française, Étienne Caniard. Le système de santé est, là encore, emblématique : si les acteurs mutualistes et paritaires restent dominants, les désengagements et la libéralisation gomment les différences Et tous sont appelés à la rescousse pour pallier les difficultés d'accès aux soins, partiellement imputables à la segmentation engendrée par la concurrence ! Ainsi, les pouvoirs publics ont créé la CMU, puis la CMU complémentaire, financée par les organismes complémentaires.
Outre-Quiévrain, la situation française interpelle. « Vu de Belgique, nous avons l'impression que le gouvernement français laisse filer la situation pour privatiser le système. Le déficit de votre Sécu est égal à notre budget de l'État », a rappelé Jean-Pascal Labille, secrétaire général de l'Union nationale des mutualités socialistes belges. « L'économie sociale est en mesure d'offrir des perspectives optimistes si elle se renouvelle et débat avec la société », a estimé, pour sa part, Jean Sammut, ex-dirigeant mutualiste, à l'origine des RIS.
À la différence de certaines enquêtes du monde associatif, l’étude de l’Irdes ne prêtera à aucune controverse: l’échantillon statistique porte sur 8200 ménages et 22200 personnes. Ses conclusions confirment les sondages commandés par les associations de patients: même s’il n’est pas dû seulement à des raisons financières, le renoncement à la complémentaire santé est plus subi que choisi.
Une nouvelle fois, une étude pointe les inégalités d'accès à la complémentaire santé. L'Institut de recherches et de documentation en économie de la santé (Irdes) souligne que le renoncement aux soins est d'autant plus important que les revenus sont faibles. Il atteint 30% chez les personnes qui n'ont aucune couverture complémentaire, 21% chez celles qui bénéficient de la couverture médicale universelle (CMU) complémentaire et 14% chez celles qui ont souscrit à un autre contrat. L'étude reposant sur des données de 2008, il faudra encore attendre la parution de l'« Enquête santé protection sociale 2009 » pour savoir si le récent relèvement des plafonds de l'aide à la complémentaire santé (ACS) a réduit ces inégalités.
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