Réforme santé : quatre mois pour réussir le reste à charge zéro

Calendrier serré, défiance des professionnels de santé face à un projet économiquement contraignant, pression des pouvoirs publics sur les complémentaires santé : la concertation pour améliorer l’accès aux soins par le reste à charge zéro a été lancée dans un climat tendu...

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Emmanuel Macron se rendra-t-il au congrès de la Mutualité française (FNMF), qui se tiendra du 13 au 15 juin prochain à Montpellier, afin d’annoncer la mise en musi­que de sa promesse de campa­gne d’un reste à charge zéro (RAC 0) sur les dépenses liées à l’optique, aux prothèses dentaires et auditives ? Bon nombre de mutualistes se posent ouvertement la question. Mais le calendrier annon­cé le 23 janvier par Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, lors du lancement de la concertation sur le RAC 0 semble avoir été arrêté pour tenir cet objectif. Les discussions avec les parties prenantes, représentants des financeurs et des organisations de professionnels de santé, doivent durer près de quatre mois. Et il se répète, dans les cercles dits bien informés, que l’administration souhaite avancer rapidement pour permettre au président de la République d’arriver à Montpellier avec un projet abouti.

Une équation difficile

Une échéance qui précède aussi les arbitrages du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2019, texte législatif qui devrait intégrer les premiers éléments du futur dispo­sitif. Mais « tout ne pourra pas aboutir cette année », a déjà prévenu Agnès Buzyn, rappelant que les mesures sur le RAC 0 monteront en puissance d’ici à la fin du quinquennat. Le fait est que quatre années ne seront pas de trop pour tenir l’engagement d’Emmanuel Macron.

En audioprothèse, la cible apparaît tellement éloignée que le syndicat national des audioprothésistes (Unsaf) a proposé un scénario en deux étapes avec un reste à charge « maîtrisé » plutôt que nul pour la plupart des porteurs d’équipements. Mais c’est sans doute en dentaire – où les discussions se déroulent dans le cadre des négociations conventionnelles reprises en septembre 2017 – que l’équation est la plus difficile à résoudre. Tout d’abord au regard des sommes en jeu, puisque le reste à charge global correspond à près de 10 % des prestations versées par les organismes complémentaires (26,4 Md€ en 2016). Elle l’est égale­ment au vu des tensions avec les représentants des professionnels de santé.

L’Union dentaire (UD), un des principaux syndicats de chirurgiens-dentistes, a choisi de ne pas participer à la réunion de lancement de la concertation qualifiée de « grande-messe ». Et, selon la Fédération des syndicats dentaires libéraux (FSDL), « on ne rattrape pas trente ans de blocage du remboursement de la couronne en trois mois ». Même son de cloche du côté de la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), dont la présidente Catherine Mojaïsky a affirmé qu’à défaut de temps, il faudrait de l’argent. « Avec 3 Md€, on règle le problème du dentaire.»

Du côté des complémentaires santé, la Mutualité française a adopté ses propositions dès la mi-décembre, alors que les deux autres principales organisations, la Fédération française de l’assurance (FFA) et le Centre technique des institutions de prévoyance (CTip), n’avaient pas encore arrêté officiellement leur position au 23 janvier. Il semblerait que les trois familles de la complémentaire santé affichent quelques divergences et différences d’approche. « Sur les verres de lunettes, le gouvernement pourrait, par exemple, baisser la TVA de 20 à 5,5 % », déclarait Thierry Beaudet, président de la FNMF. Une proposition totalement rejetée par le CTip et les partenaires sociaux qui craignent que le gouver­nement reprenne d’une main ce qu’il donne de l’autre, en remettant en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux contrats collectifs.

Mais globalement, au-delà des postures et équilibres internes, les trois familles seraient assez proches sur la façon d’aborder le chantier. En dentaire, par exemple, le panier de soins ne peut-être low-cost. « On ne va quand même pas proposer des prothèses métalliques », ironise un proche du dossier. Quitte à ce que, suggère un représentant de l’assurance, le nombre de prises en charge de prothèses soit plafonné chaque année, avant d’insister sur une montée en puissance progressive du dispositif. Les membres de l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (Unocam) partagent également l’analyse selon laquelle il sera difficile d’atteindre l’objectif d’un RAC 0 si l’Assurance maladie ne met pas au pot.

ACS : l’appel à concurrence reporté

Une réforme en entraînant une autre, Agnès Buzyn a annoncé que le dispositif d’aide à la complémentaire santé (ACS, environ 1,1 million de bénéficiaires) serait aussi adapté pour intégrer le dispositif du reste à charge zéro. L’appel public à concurrence, qui devait être lancé prochainement afin de renouveler l’offre de contrats à compter du 1er janvier 2019, sera repoussé d’un an pour prendre en compte les nouvelles garanties du reste à charge zéro, a-t-on également appris. Et la ministre de la Santé remet aussi sur le métier le chantier de la lisibilité des garanties. Une problématique qui avait déjà donné lieu à un engagement de l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (Unocam) en 2010, à la suite d’une demande pressante de Roselyne Bachelot, ministre de la Santé de Nicolas Sarkozy. Les complémentaires ont prévu de faire rapidement des propositions.

Éviter la flambée des tarifs

La ministre Agnès Buzyn a demandé aux organismes complémentaires de « retrouver une marge de manœuvre pour ne pas augmenter leurs tarifs », or des actuaires évoquent un coût esti­mé de 4 Md€ correspondant à des hausses potentielles de cotisations atteignant 14 %... Une flambée des tarifs qui serait difficilement supportable pour les plus fragiles, en particulier les seniors. Autre souci pour les complémentaires : éviter que la mise en place du reste à charge zéro ne se traduise par une standar­disation accrue des offres – le RAC 0 devant être inclus dans le cahier des charges des contrats responsables. Certains s’inquiètent d’ailleurs de ce que, dans ce cadre, les travaux menés en parallèle sur la lisibilité des garanties santé (lire encadré) ne remettent au goût du jour l’instau­ration de contrats types, projet que l’exécutif semble avoir abandonné.

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