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Quand les courtiers s'unissent aux fonds d'investissement
Les courtiers, en pleine mutation générationnelle, digitale, et réglementaire, sont de plus en plus nombreux à ouvrir leur capital aux fonds d’investissement. Explications.

« Je vois au minimum un nouveau courtier par mois et j’ai quatre LBO (leverage buy out) en cours », annonce David Salabi qui préside la banque d’affaires Cambon Partners, spécialisée dans les fusions-acquisitions de cabinets de courtage. Sur la trentaine d’opérations que ses 25 collaborateurs réalisent chaque année, 5 à 10 concernent un fonds d’investissement. Autant dire qu’il confirme l’effervescence qui agite le marché avec des levées de fonds à six chiffres. « Plutôt que de vendre la totalité de leur entreprise, de plus en plus de courtiers privilégient une opération sur mesure dans laquelle ils peuvent rejouer une partie de leurs parts et associer leurs managers », confie l’homme d’affaires.
Plusieurs raisons concourent à ce phénomène. « Le courtage coche toutes les cases d’une bonne opération de LBO : la croissance de chiffre d’affaires, la récurrence avec des taux de perte de CA proches de 2 % et la rentabilité avec des bonnes marges et une très bonne génération de cash-flow », détaille un représentant d’un des principaux fonds d’investissement du secteur.
David Salabi, président de Cambon Partners
« Les LBO se démocratisent »
- Pourquoi les fonds d’investissement viennent-ils, en masse, faire « leur marché » dans le secteur du courtage ?
Pour trois raisons : croissance, rentabilité et récurrence. Non seulement les cabinets de courtage présentent des progressions annuelles de leur chiffre d’affaires à deux chiffres, mais leur CA est, de surcroît, garanti à 90 % par le jeu de la reconduction tacite des contrats. L’excédent brut d’exploitation est, par ailleurs, profitable, autour de 20 %. Et ensuite, les opérations de LBO qui étaient auparavant des « méga deals » financiers de grandes entreprises se sont démocratisées. Elles concernent aujourd’hui les moyennes, voire les petites entreprises. Or, les dirigeants, dans le courtage, arrivent à maturité et veulent sécuriser ou transmettre leur patrimoine en cédant une partie (majoritaire ou minoritaire) du capital de leur groupe à un fonds.- Tous les courtiers sont-ils concernés ?
Non. Cela s’adresse aux courtiers qui réalisent plus de 5 M€ de commissions par an. En dessous, les cabinets sont repris par d’autres cabinets et les transactions restent dans la sphère industrielle. L’avantage de traiter avec la finance, c’est qu’au contraire d’une vente sèche, la cession d’une partie du capital à un fonds permet de continuer l’histoire.
Par ici la monnaie
Les poches pleines de liquidités, en raison des taux bas, les investisseurs se bousculent aux portes du courtage et n’hésitent plus à parier sur ces PME dirigées par des entrepreneurs indépendants et spécialisés. De leur côté, les mariées battent des cils… D’abord parce que les courtiers âgés en moyenne de 53 ans doivent gérer des problématiques de cession. « Il reste encore beaucoup d’actionnaires familiaux et on assiste à un renouvellement générationnel », observe le cadre d’un fonds actif. Ensuite, la concentration, qui bat son plein dans le secteur, pousse les cabinets à atteindre une taille critique en acquérant d’autres cabinets, en développant une activité de grossiste, voire en s’internationalisant, sans parler de leur digitalisation qui n’est pas achevée. Autant d’investissements à financer pour les courtiers tentés par la possibilité de souscrire une dette bon marché. Autre intérêt de l’ouverture de son capital à un fonds : éviter la « casse sociale » quasi inévitable en cas de fusion avec un autre cabinet.
Enfin, la conjoncture est porteuse. En prise avec les nouvelles technologies, la data, les produits innovants, les courtiers-entrepreneurs apprécient le background et les compétences des fonds d’investissement en matière d’accompagnement et de développement. Ardian aurait ainsi soutenu Siaci dans sa volonté de doubler son budget IT et SPVie ne cache pas avoir traité avec K Partners pour créer, entre autres, sa filiale informatique Assurware.
Et inutile de se voiler la face : les fonds ont la réputation de mieux payer… De fait, leur méthode de valorisation des cabinets est bien plus favorable aux courtiers : entre huit et quinze fois l’Ebitda (ndlr : bénéfice d’une société avant soustraction des intérêts, impôts, taxes, dépréciation et amortissement), alors que dans les opérations traditionnelles, les estimations s’appuient sur le CA net annuel de rétrocessions (multiplié par 1,5 et 2,5 pour l’IARD et entre 2 et 3,5 pour l’assurance de personnes).
Qui sont les fonds qui draguent les courtiers ?
La liste n’est pas exhaustive, mais de plus en plus fournie : Ardian ; K Partners (Inter Invest Capital) ; Turenne Capital ; Idinvest ; Edmond de Rothschild Investment Partners et ses autres fonds (Winch Capital 3, ActomMezz...) ; Apax Partners ; AnaCap ; TA Associates ; Eurazeo PME ; Argos Soditic ; Azulis Capital ; BlackFin ; Bridgepoint ; Capextens ; Chevrillon ; Ciclad ; Cobalt ; IFP Investissement ; IDI ; Initiative et finances ; LBO France ; LFPI, MBO Partenaires ; Montefiore ; Naxicap ; Omnes Capital (ex-Crédit agricole Private Equity) ; Equistone Partners (ex-Barclays Private Equity) ; JC Flowers & Co ; Paluel Marmont ; Parquest ; Pechel ; Pragma ; Repam ; Siparex ; Accel Partners ; Alaia ; Iris...
Des cabinets survalorisés
Plus le courtier est leader sur une niche, possède un portefeuille important et diversifié avec une rentabilité supérieure à la moyenne et une application sans tâche de la réglementation, mieux c’est en terme de valorisation ! Inutile, donc, d’espérer céder à un fonds pour échapper à DDA… « Il faut être ultraclean ! », insiste David Salabi. Par ailleurs, les fonds (re)prennent rarement 100 % du capital des cabinets. « Ils ont besoin du management en place, que l’entente soit totale et d’adhérer au projet entrepreneurial », note le dirigeant d’un cabinet qui réalise environ 20 M€ de CA par an, actuellement en tractation avec cinq fonds, après en avoir rencontré vingt-quatre ! « La difficulté, c’est de partager le temps que l’on s’apprête à vivre en commun, la stratégie développée et la sortie, car il ne faut pas être naïf, le fonds est là pour la plus-value et le money back », témoigne-t-il. « Le taux de rentabilité interne (TRI) est optimisé dans un horizon de quatre ans, c’est pourquoi les fonds tournent », ajoute David Salabi.
La dernière opération retentissante concerne ainsi Ciprés Assurances, un grossiste qui accueille déjà son deuxième fonds. Le 4 juillet dernier, Apax Partners remplaçait TA Associates au capital du courtier spécialisé dans la protection sociale complémentaire des TNS et TPE/PME. La part du management passe depuis lors à 38 % et la feuille de route est tracée pour cinq ans. « Tout le monde est satisfait : l’action est valorisée, le management est monté au capital et pilote l’entreprise, les projets sont féconds avec le lancement d’une offre prévoyance TPE, la refonte de nos systèmes d’information, l’ajout d’un produit retraite TNS et l’ambition d’une opération de croissance externe en 2018, pour devenir la référence assurance des entrepreneurs », relate Laurent Ouazana, président de Ciprés Assurances.
Cette affaire a été négociée par la banque d’affaires UBS. Être accompagné est, en effet, quasiment indispensable tant le fond et la forme du business model comptent et surtout, tant la logique du TRI appelle à la vigilance. « Pour maximiser son TRI, le fonds propose souvent une dette d’acquisition très importante, or si elle est mal quantifiée, la holding peut se retrouver dans l’incapacité de faire face au remboursement alors même que l’activité et la rentabilité sont correctes », poursuit le courtier en cours de cession. « Au final c’est de l’humain, le partage d’une vision, même si on suit des indicateurs de performance comme chaque entreprise », exprime Laurent Ouazana.
En sus des LBO et des logiques de capital développement, le capital risk s’intéresse aussi au courtage depuis la vague insurtech. Shift Technologies, start-up spécialisée dans la lutte contre la fraude à l’assurance, a levé 10 M€ auprès du fonds Accel Partners en mai 2016 et le jeune courtier digital +Simple.fr a déjà ouvert son capital à des business angels. Bref, le mouvement ne semble qu’à ses débuts, même si certains s’inquiètent déjà de la création d’une bulle financière.
Les principales acquisitions qui ont secoué le monde du courtage
- 2009 Le fonds Astorg signe avec les actionnaires familiaux de Gras Savoye et le groupe Willis la réorganisation du capital par LBO(32 % chacun et 150 M€ de dette d’acquisition). Créé en 2004, AssurOne s’appuie sur BPI France et Seventure Partners pour asseoir son modèle digital.
- 2011 Le courtier par téléphone Filiassur fait appel au fonds Initiative et Finance pour se développer à l’international. JC Flowers & Co remplace PAI Partners pour 830 M€ au capital majoritaire de la CEP, courtier en assurance emprunteur. ID Invest et Serena Capital accompagnent Santé Vet alors que Santiane lève 5 M€ auprès de BNP Paribas Private Equity.
- 2012 Axelliance lève 1 M€ auprès de Turenne Capital (5 % des parts) qui rejoint CM-CIC Capital Finance (20 %) auprès des dirigeants. Depuis, le courtier a acquis Vivens, Axiome, Squadra et Vitae Assurances. Le groupe affiche un CA supérieur à 70 M€ et signerait actuellement avec un nouveau fonds...
- 2013 Santiane dit au revoir à BNP Paribas Private Equity pour le family office Sagard qui prend une part plus élevée au capital. Equistone Partners accompagne l’essor de Meilleurtaux tandis que le courtier en assurance maritime Eyssautier quitte Gras Savoye pour monter un LBO avec Omnes Capital. (...)
- 2014 Equistone Partners soutient Finaxy Group qui a déjà repris 17 entreprises depuis sa création en 2008, grâce à l’appui initial d’un family office. AssurOne change d’investisseurs pour Anacap Financial Partners. Exit le groupe Molitor, Ciprés Assurances passe aux mains de TA Associates et du management du grossiste.
- 2015 Ardian soutient Siaci Saint Honoré dans sa croissance externe (Cap Marine, Dufaud Courtage, Expat Insurance, Alpha Lloyd’s, AC Conseil...). BlackFin Capital Partners devient l’actionnaire majoritaire de Lucheux, rebaptisé LSA Courtage (Assurpeople) à la faveur du départ du fondateur. SPVie effectue une levée de fonds à six chiffres auprès de K Partners. Fini Sagard, la famille Courtin (Santiane) choisit BlackFin plutôt que de se vendre à un assureur, une mutuelle ou un courtier.
- 2016 Eurazeo PME entre au capital d’AssurCopro qui a acquis depuis Interassurances et le cabinet Jacques Boulard. Winch Capital 3 prend une part minoritaire au capital du spécialiste de l’affinitaire SFAM.
- 2017 Le fonds Apax France IX succède à TA Associates au capital majoritaire (62 %) de Ciprés Assurances. JC Flowers fait appel à JP Morgan et Messier Paris pour sortir de CEP...
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