Thomas Groh, sous-directeur des Assurances à la Direction générale du Trésor : "Nous ne pouvons pas nous permettre de ralentir sur la transposition de Solvabilité 2"

Thomas Groh se veut rassurant quant aux marges de manoeuvre des assureurs en matière de financement de l'économie. Il pointe le potentiel des réformes nationales et européennes en matière de diversification des placements des assureurs.

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Thomas Groh, sous-directeur des Assurances à la Direction générale du Trésor :
Thomas Groh, Sous-directeur des assurances à la direction générale du Trésor

SON PARCOURS

Thomas Groh est licencié d'histoire et diplômé d'HEC, de Sciences-Po Paris et de l'ENA.
  • 2002- 2007 Diverses fonctions au sein de la Direction générale du Trésor autour des questions environnementales et de financement du développement.
  • 2007 - 2009 Chef de cabinet de la Présidente du Fonds pour l'Environnement mondial (GEF) à Washington.
  • 2009 - 2011 Chef du bureau Afrique subsaharienne, zone Franc et AFD à la Direction générale du Trésor.
  • 2011-2013 Chef du bureau Areva, GDF Suez et Eramet à l'Agence des Participations de l'État.
  • Depuis septembre 2013 Sous-directeur des assurances à la Direction générale du Trésor.
La sous-direction des assurances du Trésor est au coeur de tout ce qui touche à l'assurance en France...

Notre coeur de métier est la préparation, sous l'autorité du ministre des Finances, Michel Sapin, de la législation et de la réglementation relatives aux entreprises et aux marchés des assurances de personnes et de biens. Nous contribuons ainsi aux prises de décisions du ministre s'agissant aussi bien des réformes nationales, comme par exemple celle de l'assurance vie ces derniers mois, que des négociations puis des transpositions au niveau français des textes européens : Solvabilité 2, DIA2, IRP 2... En lien avec les ministères concernés, nous suivons de près les législations portant sur les catastrophes naturelles et calamités agricoles, ainsi que différents sujets avec une forte dimension sociale, comme les retraites par capitalisation, l'assurance-dépendance ou encore l'accès à l'emprunt des personnes présentant un risque aggravé de santé. Nous participons en outre au pilotage d'un assez grand nombre d'entités publiques ou privées, ce qui nous permet aussi de suivre le bon fonctionnement des marchés et identifier les problèmes éventuels. Par exemple, le Trésor est administrateur ou commissaire du gouvernement de l'Orias, du Fonds de réserve des retraites (FRR), du FGAO ou encore du FGTI. Nous suivons aussi avec les autres ministères de tutelle la gestion de l'ERAFP, le régime de retraite additionnelle de la fonction publique. Enfin, je suis moi-même administrateur de la CCR. Naturellement, ce travail implique un dialogue quotidien non seulement avec le cabinet du ministre, pour bien caler les positions ministérielles, mais aussi avec nos collègues des autres ministères, les différentes fédérations professionnelles, ou encore l'ACPR, via notamment son collège assurances auquel nous participons.

Quel regard portez-vous sur la réforme de l'assurance vie ? Certains parlementaires laissent entendre qu'il faudra remettre l'ouvrage sur le métier...

Le potentiel des réformes qui ont été mises en oeuvre en matière de diversification des placements des assureurs et, partant, de financement de notre économie, est très important. Le Président de la République l'a bien rappelé lors des récentes assises du financement et de l'investissement. Il est normal que l'écosystème mette un peu de temps à s'approprier les nouveaux produits, dont la commercialisation ne fait que débuter. Cette réforme va dans le sens de l'intérêt bien compris des professionnels comme des assurés, qui y trouveront là un nouveau support intermédiaire entre les fonds euros et les unités de compte.

L'assurance vie allemande souffre de ses taux garantis élevés. Êtes-vous serein sur l'impact de la baisse des taux d'intérêt sur la santé des assureurs vie ?

La situation est différente entre la France et Allemagne, où la législation a permis plus longtemps de garantir des taux élevés. La baisse des taux n'est certes pas une bonne nouvelle pour les assureurs, mais les risques sont maîtrisés.

« La baisse des taux n’est pas une bonne nouvelle pour les assureurs, mais les risques sont maîtrisés. »

Vous devez mener la transposition de Solvabilité 2 en droit français. Où en est-on sur les sujets sensibles, comme la gouvernance ?

Nous sommes en passe d'obtenir une habilitation du Parlement pour procéder par voie d'ordonnance. La transposition doit avoir lieu avant le 31 mars 2015, ce qui, vu le rétroplanning, signifie que d'ici à la fin de l'année, les textes doivent être stabilisés. Cela représente beaucoup de travail compte tenu de la volumétrie des dispositions. Nous avons déjà bien avancé, mais nous ne pouvons pas du tout nous permettre de ralentir. Sur les questions prudentielles, notre marge de manoeuvre est limitée car tout est fixé par la directive et par le règlement d'application directe. Sur la gouvernance, nous avons mené une concertation très approfondie et sommes en train de converger.

Va-t-on voir éclore de nouvelles formes de groupes ?

En effet, l'idée étant que les mêmes outils puissent être disponibles dans les trois codes. Deux formes de regroupement sont envisagées : des groupes prudentiels au sens de Solvabilité 2, dans lesquels s'imposeront mécaniquement des règles de solidarité financière, de reporting et de gouvernance (dont les fonctions clefs communes dans la structure faîtière) ; et des groupements correspondant à une forme d'intégration moins aboutie, de type confédération, dans lesquels chacun reste responsable de sa propre solvabilité, le groupement constitué ne disposant pas d'une influence dominante sur ses différents membres. Tous les regroupements qui existent déjà actuellement auront la possibilité d'opter librement pour l'un ou l'autre modèle. Cela va impliquer dans certains cas une évolution des statuts et un dialogue approfondi avec l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Le fait d'être demain un groupe au sens de Solvabilité 2 entraînera des obligations accrues mais procurera aussi certains avantages en matière de diversification, de gestion du capital et de communication vis-à-vis du marché, notamment. C'est donnant-donnant.

Des voix s'élèvent pour signifier l'incompatibilité d'une activité comme la retraite avec Solvabilité 2...

Il convient d'abord de rappeler que les règles Solvabilité 2 ne seront pas applicables aux activités de retraite professionnelle supplémentaire avant au moins 2019. Il ne faut pas non plus omettre le paquet « branches longues » qui a été négocié l'année dernière à la demande de la France et qui constitue un progrès très significatif pour appréhender les risques longs. Par ailleurs, il y a un travail important en cours avec les autres ministères concernés et la Place pour moderniser la réglementation des régimes par capitalisation dits branche 26, nous avons là de vraies marges de manoeuvre au plan national. Cela dit, il y a effectivement à moyen terme un sujet de concurrence à armes égales en matière prudentielle entre assureurs et fonds de pension, qui nous mobilise beaucoup à Bruxelles.

« Il y a effectivement, à moyen terme, un sujet de concurrence à armes égales en matière prudentielle entre assureurs et fonds de pension. »

Ne craignez-vous pas que Solvabilité 2 soit un frein au financement de l'économie par les assureurs ?

L'engagement de notre ministre a permis d'obtenir plusieurs avancées dans les actes délégués, notamment sur la titrisation. La clause de revue prévue au plus tard d'ici fin 2018 sera aussi l'occasion de reposer un certain nombre de sujets. Quoi qu'il en soit, il convient de rappeler que Solvabilité 2 comporte un grand nombre de mécanismes transitoires, y compris s'agissant des exigences de capital pour la détention d'actions. Il n'y aura pas de « falaise » soudaine à franchir, d'autant que les entreprises pourront faire jouer des effets de diversification et, après accord de l'ACPR, utiliser des modèles internes moins exigeants en capital. Et sans attendre Solvabilité 2, nous disposons d'autres leviers. Le Gouvernement a déjà joué sur la structure des passifs des assureurs en créant les contrats eurocroissance. Il a également décidé d'ouvrir, d'ici à la fin de l'année, l'investissement dans les fonds de prêts à l'économie aux mutuelles et aux IP, avec un champ d'application élargi en termes d'actifs. Enfin, le niveau très bas des taux d'intérêt incite les assureurs à aller chercher du rendement sur d'autres types d'investissements, même s'il faut bien sûr rester raisonnable.

N'y a-t-il pas un risque de télescopage entre Solvabilité 2 et le projet d'harmonisation prudentielle internationale ?

La mise en place progressive, sous la houlette de l'IAIS, d'exigences prudentielles spécifiques pour les assureurs systémiques mais aussi d'un cadre commun pour les assureurs actifs internationalement, est une demande du G20, soutenue par la France. Il faut avoir conscience qu'il n'existe aujourd'hui aucune norme internationale, alors que l'édifice a été entamé dès la fin des années 80 pour les banques. Le Gouvernement, et tout particulièrement le ministre, qui est au coeur des négociations au G20, est attaché à ce que la future réglementation internationale soit la plus cohérente possible avec le cadre de Solvabilité 2 et aussi que les entreprises n'aient à gérer qu'un seul régime prudentiel. Il faudra par ailleurs s'assurer que nos principaux partenaires entendent eux aussi appliquer les nouvelles règles du jeu.

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