Guy Herry et François Venturini, président et DG d'Harmonie mutuelles : « Nous voulons constituer un pôle de l'économie sociale »

En quelques années, les dirigeants d'Harmonie mutuelles ont bâti un groupe mutualiste dont la fusion donnera naissance, l'an prochain, au premier opérateur du marché de la complémentaire santé toutes familles confondues, avec quelque 2 Md€ de cotisations en affaires directes. En exclusivité pour « L'Argus de l'assurance », ils dévoilent leur stratégie en matière d'organisation, de développement et de partenariats.

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Quel est le calendrier de la fusion ?

Guy Herry - Une nouvelle mutuelle, Harmonie mutuelle sans « S », à ne pas confondre avec l'union actuelle (Harmonie mutuelles), a été créée lors d'une assemblée générale constitutive à Lyon, le 26 novembre. Elle va accueillir nos cinq grandes mutuelles interprofessionnelles que sont Mutuelle Existence, Harmonie mutualité, Prévadiès, Santévie et Spheria Val-de-France. En juin prochain, leurs assemblées générales seront appelées à se prononcer sur leur transfert de portefeuille. Nous attendons l'agrément de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) pour fin 2012, et un fonctionnement de la nouvelle mutuelle en 2013.

Vous avez construit très discrètement le premier opérateur en complémentaire santé (en affaires directes), mais n'avez-vous pas un manque de notoriété à combler ?

François Venturini - C'est certain, nous allons y travailler. En septembre, nous lancerons une campagne pour déployer la nouvelle marque et son logo. Il s'agit d'affirmer notre positionnement. Dans le même temps, les anciennes enseignes vont s'effacer progressivement et nos 355 agences porteront les couleurs d'Harmonie mutuelle sans « S ».

Comment allez-vous maintenir le lien de proximité avec les adhérents, revendiqué comme l'une des principales valeurs mutualistes ?

G. H. - Il faut distinguer deux dimensions, l'entreprise et les instances mutualistes. Ces dernières s'organiseront par régions, qui animeront des « territoires ». Dans ceux-ci, les sections mutualistes maintiendront le lien de proximité. Par exemple, en Bretagne, où nous sommes fortement implantés, le président de la région animera quatre territoires correspondant chacun à un département. Chaque territoire sera chargé de la représentation auprès des pouvoirs publics, des partenariats associatifs et sportifs, de l'action sociale, de la prévention, etc. Dans les régions où nous sommes moins implantés, comme le Sud-ouest ou le Nord, un territoire peut recouvrir plusieurs départements. Au total, nous aurons 50 territoires regroupés au sein de 12 régions. Ces relais sont nécessaires pour maintenir une vraie proximité. Parallèlement, nous interpellons fortement les territoires sur le renouvellement des élus, avec, notamment, un souci de parité. Je ne parle pas de quotas, mais d'objectifs fermes, car il n'y a pas beaucoup de femmes présidentes de section territoriale.

Comment mène-t-on une fusion de cette ampleur en maintenant l'emploi et sans mobilité forcée ?

F. V. - Garantir l'emploi est un engagement fort qui a été pris vis-à-vis du personnel et des partenaires sociaux. Nous sommes en dialogue permanent avec les institutions représentatives du personnel et un accord de méthode a été signé avec l'ensemble des centrales syndicales. Parallèlement aux 12 régions politiques, nous construisons 6 régions managériales. Il s'agit de limiter les effets négatifs de la grande taille en rapprochant le plus possible le management des équipes de terrain. Concrètement, ces régions seront pilotées par des directeurs généraux adjoints. L'enjeu est de trouver le bon équilibre entre centralisation et régionalisation. Notre objectif est qu'avant la fusion, chaque collaborateur sache quelle sera sa place dans l'entreprise. Ce travail de définition doit être terminé d'ici à fin avril.

Dans le contexte de concentration du secteur, on parle souvent de taille critique. Quel est son niveau, et l'avez-vous atteint ?

F. V. - Il y a quelques années, une mutuelle qui comptait 500 000 personnes protégées avait atteint la taille critique. Aujourd'hui, nous sommes loin de ce chiffre. La notion de taille critique est donc toute relative. Au-delà de cette problématique de taille, notre objectif est aujourd'hui d'être présents dans l'ensemble du territoire. Afin d'améliorer ce maillage, nous privilégions la collaboration avec d'autres mutuelles. Ces partenariats peuvent se traduire à terme par une fusion, mais pas forcément. Par exemple, il n'y a pas lieu de fusionner une mutuelle d'entreprise qui bénéficie d'un fort ancrage. C'est pourquoi nous allons conserver une union mutualiste pour accueillir des mutuelles souhaitant s'adosser à un groupe national qui leur apportera les services dont elles ont besoin. Depuis l'an dernier, nous avons démontré notre capacité à attirer à la fois des mutuelles de taille significative, comme Santévie et Spheria, mais aussi, on en parle moins, des mutuelles comme Thiers mutualité, la SMT à Narbonne ou La Prévoyance à Strasbourg, et d'autres. Ces mutuelles que nous fédérons, à côté de celles qui vont fusionner représentent près de 400 000 personnes protégées.

Avez-vous identifié des mutuelles susceptibles de vous intéresser, comme le font d'autres acteurs ?

F. V. - Oui, nous avons une équipe chargée de ces contacts. Plusieurs discussions sont en cours, dans toutes les régions. Nous avons aussi beaucoup travaillé sur l'offre que nous pouvons proposer à ces mutuelles. Elle peut aller de l'aide à la gestion, notamment tout ce qui touche au contrôle interne, à la réassurance ou à la substitution. Nous avons plusieurs mutuelles substituées dans le groupe. Il peut aussi être intéressant de mettre des moyens en commun sur des sujets comme le conventionnement ou la prévoyance.

Deux mutuelles de la fonction publique, la Mnam et la Smar, ont rejoint votre groupe. Souhaitez-vous poursuivre votre développement dans ce domaine, notamment chez les territoriaux, ainsi que dans la perspective du prochain référencement par les ministères ?

G. H. - Nous ne cherchons pas à attirer des mutuelles de la fonction publique, mais nous essayons de répondre aux besoins de celles qui prennent contact avec nous, comme cela a été le cas pour la Mnam et la Smar. Aujourd'hui, un rapprochement fort se prépare entre ces deux mutuelles.

Concernant la fonction publique territoriale, nous n'avons pas attendu le récent décret sur la protection sociale complémentaire pour être présents dans les collectivités. Nous y sommes peut-être depuis plus longtemps que la Mutuelle nationale territoriale.

Pour la fonction publique d'État, je pense que le prochain référencement sera beaucoup plus ouvert que le premier et que les ministères seront obligés de tenir compte des propositions d'autres acteurs que les mutuelles historiques. Cela dit, nous nous inscrivons plutôt dans une proposition de soutien aux mutuelles de la fonction publique qui voudraient venir chez nous.

À propos de Malakoff-Médéric, êtes-vous satisfaits de votre plate-forme commune Kalivia ? Par ailleurs, vous arrive-t-il de répondre en commun à des appels d'offres en collectif ?

F. V. - Avec le conventionnement optique de Kalivia, notre coopération donne des résultats très intéressants en matière de tarifs. Dans le réseau, le prix moyen est en moyenne inférieur de 16%, le reste-à-charge moyen est réduit de 40% et le taux de fréquentation des opticiens du réseau a augmenté de 25% en six mois. Nous étendrons bientôt cette démarche au secteur dentaire.

Concernant les réponses aux appels d'offres, notre taille fait que nous nous positionnons aujourd'hui sur des marchés plus importants que par le passé. Il s'agit d'affaires où les accords entre opérateurs sont monnaie courante, et peuvent être à géométrie variable. Par exemple, nous réassurons 30% du contrat que Malakoff-Médéric a remporté chez PSA.

Votre partenariat pourrait-il aller plus loin ?

G. H. - Nous souhaitons d'abord créer une union mutualiste de groupe (UMG) avec des partenaires mutualistes. Dans un premier temps, elle sera l'instrument d'une solidarité financière au sein de l'union Harmonie mutuelle : l'UMG devrait naître avant la fin de l'année et regrouper la Mnam, la Smar, Mare-Gaillard et d'autres mutuelles interprofessionnelles. Ensuite, il faudra constituer un pôle de l'économie sociale, dont l'UMG pourrait être le support. Il pourrait comprendre des mutuelles, des mutuelles d'assurances, des institutions de prévoyance, etc. Rien n'est tranché aujourd'hui, mais cela me paraît indispensable par rapport aux évolutions à venir. Et l'avantage de l'UMG est que les mutuelles y sont majoritaires.

Souhaitez-vous vous diversifier ?

G. H. - Nous expérimentons, dans certaines régions et auprès des travailleurs non salariés, la distribution d'une offre dommages de la Matmut. Il est nécessaire de proposer tout une gamme de produits à nos adhérents, en IARD, comme en épargne et en retraite supplémentaire. Mais nous le ferons via des partenariats et pas en tant qu'assureur. Notre métier reste la santé et la prévoyance. Pour cette raison, la création de Mutex SA était primordiale. Nous estimons en effet que le collectif va continuer à se développer, notamment par les accords de branche. Il est indispensable pour nous d'être retenus dans ce cadre, car ces accords concernent beaucoup de PME où se trouvent nos adhérents individuels.

Nous souhaitons aussi que les contrats collectifs, dans la mesure où ils bénéficient de l'aide de l'État via des exonérations fiscales et sociales, deviennent plus vertueux et plus transparents. Par exemple, les différences de garanties entre les catégories cadres et non-cadres ne se justifient pas. Nous avons défini une dizaine de principes par rapport à ces problématiques et voulons travailler sur le sujet avec les partenaires sociaux.

Plus généralement, notre ambition est de nous affirmer comme un acteur global de la santé. Il s'agit, notamment, de développer une offre assurantielle complète (santé, prévoyance, retraite) et de favoriser l'accès à des soins de qualité à travers le conventionnement de réseaux de santé et une offre de soins et de services mutualistes.

LEUR PARCOURS

GUY HERRY  Né en 1945, il a été électromécanicien à l'arsenal de Brest de 1963 à 2000.

  • 1972 à 1984 Permanent syndical, il a également été administrateur de la CPAM du Finistère et du CHU de Brest.
  • 1985 Administrateur de la FNMF, puis secrétaire général de 1993 à 2009.
  • 2012 Vice-président de Prévadiès, président de l'union Harmonie mutuelles et président de la nouvelle structure Harmonie mutuelle.

FRANÇOIS VENTURINI  Né en 1950, il est diplômé de la Sorbonne et de l'université de Columbia à New York.

  • Il a commencé sa carrière dans le domaine du logement social, notamment à la SCIC SA, société de promotion et de gestion immobilière du groupe Caisse des dépôts développement.
  • 1982 Directeur général d'Almarria CA, une société chargée de la promotion de logements sociaux au Venezuela.
  • 1997 Directeur général d'Harmonie mutualité jusqu'en 2009, puis codirecteur de l'union Harmonie mutuelles dès sa création en 2004, il est devenu directeur général de cette dernière en 2010. Il est également délégué général d'Harmonie mutualité.

 

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