Rémunération des intermédiaires, le mécanisme des précomptes survit à DDA

Effective depuis le 1er octobre 2018, la directive sur la distribution d'assurances (DDA) encadre strictement les modes de rémunérations des intermédiaires. Pour autant, elle ne remet pas en cause le mécanisme des précomptes... Une analyse d'Esther Bendelac, avocate et docteur en droit.

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Rémunération des intermédiaires, le mécanisme des précomptes survit à DDA
DDA impose au distributeur de justifier, de manière circonstanciée, les motifs de sa recommandation, notamment en utilisant un test d'adéquation reprenant les exigences et les besoins du prospect.

La jurisprudence a expressément précisé que « la reprise de commissions peut s'analyser comme un paiement conditionnel de commissions. Ce mécanisme d'avance et de reprise, sans intérêt, ne s'assimile en aucune manière à une opération de prêt ou de crédit à titre onéreux ».

Le fonctionnement du précompte

En d'autres termes, les commissions précomptées versées par un concepteur de produits d'assurance à un distributeur de produits d'assurance sont égales aux commissions d'apport équivalentes à une année. Les commissions précomptées sont des avances sur rémunération représentant une année de commissions par contrat.

Les commissions d'apport sont évaluées au regard de l'encaissement effectif des primes. Elles sont versées et restent dues au distributeur si, et seulement si, à l'échéance de la première année les assurés ont toujours cette qualité. C'est-à-dire que le distributeur a effectivement encaissé toutes leurs primes et que le contrat en cause n'a pas été annulé, rétracté ou encore résilié.

A contrario si, à l'échéance de la première année, plusieurs contrats n'ont pas été honorés, les avances sur rémunérations - représentant une année de commissions - ne sont plus dues au distributeur de produits d'assurance.

C'est pourquoi, par l'intermédiaire de la clause de reprise de commissions (généralement incluse au sein des conventions de distribution), le distributeur reverse le solde des commissions perçues lors de l'encaissement des primes au concepteur de produits d'assurance (lors du versement de la commission précomptée) mais non dues (à cause du non-paiement des primes ou de la rupture du contrat).

Ces commissions font donc l'objet de reprises de commissions en cas d'impayés de cotisations par les assurés. Est ainsi inclus le cas de la rupture contractuelle, pour exemple annulation, rétractation, résiliation.

Selon la récente jurisprudence (août 2018), dès lors que les commissions précomptées sont assorties d'une clause de reprise de commissions acceptées, elles ne constituent pas une atteinte au droit à commission au motif que « la rémunération est bien effective et peut f aire l'objet d'une avance ».

L'ordonnance du 16 mai 2018 : DDA

L'article L.521-1, I du code des assurances impose - sans considération du mode de rémunération - aux distributeurs de produits d'assurance d'agir de manière honnête, impartiale et professionnelle et ce, au mieux des intérêts de leur client.

Selon l'article L. 521-2, II, 2, le distributeur de produits d'assurance doit indiquer son mode de rémunération. Ainsi, lorsqu'un courtier perçoit des précomptes, il doit indiquer au client qu'il perçoit des commissions. En effet, pour rappel, les commissions doivent être révélées dans leur nature aux clients, contrairement aux honoraires qui doivent être communiqués dans leur montant ou à défaut son mode de calcul doit leur être transmis.

Enfin, l'article L. 521-1, III du code des assurances instaure un principe de transparence et d'indépendance au regard de l'octroi des rémunérations aux intermédiaires d'assurance et aux salariés.

La rémunération doit donc être objective et les potentiels conflits d'intérêts révélés aux assurés afin que les distributeurs respectent leur obligation d'agir au mieux des intérêts de leurs clients. Une rémunération objective doit nécessairement être corroborée parla durée du contrat. Force est de constater quel'existence de la clause dite de reprise de commissions permet de participer à cette obligation.

Par ailleurs, l'article L. 521-4 du même code dispose que « le distributeur conseille un contrat qui est cohérent avec les exigences et les besoins du souscripteur éventuel ou de l'adhérent éventuel et précise les raisons qui motivent ce conseil ».

Cette nouvelle disposition impose au distributeur de justifier, de manière circonstanciée, les motifs de sa recommandation, notamment en utilisant un test d'adéquation reprenant concomitamment les exigences et besoins du prospect ainsi que les principales garanties ducontrat proposé.

Le conflit d'intérêts

Nil'ordonnance n° 2018-36, ni le décret n° 2018-431 ne suppriment expressément les commissions précomptées. Cependant, compte tenu de l'essence même de ces commissions précomptées, ou avances sur rémunération, il est impératif, pour qu'elles soient conformes à la réglementation, qu'elles respectent l'ensemble des obligations susmentionnées que sont : la révélation des conflits d'intérêts, la communication du mode de rémunération, la motivation du conseil et la présence d'une clause de reprise dans les conventions conclues avec les concepteurs de produits d'assurance. Les trois premiers éléments doivent, en toute hypothèse et non exclusivement en présence de commissions précomptées, être révélés aux prospects.

Une commission précomptée est susceptible d'être à l'origine d'un conflit d'intérêts car un distributeur peut préconiser le contrat d'assurance A plutôt que le contrat d'assurance B en raison de la mise en place de commissions précomptées au sein de la première convention.

Pour résoudre unetelle difficulté, il est impératif de révéler le conflit d'intérêts en mentionnant le mode de rémunération perçu par le distributeur dans le cadre de ce contrat. Ainsi, la mention « commission précomptée »pourrait être utilisée dans le document d'entrée en relation ou équivalent (document réglementaire reprenant l'énoncé des mentions obligatoires à remettre aux prospects avant la souscription ou l'adhésion d'un contrat d'assurance).

Par ailleurs et afin que le distributeur de produits d'assurance agisse aux mieux des intérêts du souscripteur, il est impératif qu'il accorde une grande importance à la motivation de son conseil, soit au test d'adéquation. Le produit préconisé parle distributeur de produits d'assurance doit donc être en parfaite adéquation avec les exigences et les besoins du client. Ce dernier pourra toutefois grâce à la clause dite de réserve, choisir un autre produit d'assurance. Dès lorsque le conseil du distributeur est dûment motivé, aucun reproche sur le terrain du comportement préjudiciable ne pourra lui être opposé.

La rémunération en question

Enfin, la rémunération du distributeur de produits d'assurance doit être objective et une contrepartie de cette rémunération doit exister. Dès lors qu'une clause de reprise des commissions est prévue dans les conventions de distribution conclues entre les compagnies d'assurance et les intermédiaires d'assurance, aucune absence de contrepartie ne pourra être opposée.

En conclusion, si le distributeur de produits d'assurance respecte la réglementation imposée par la transposition de la directive européenne dite DDA, aucun élément juridique ne vient contre-dire la possibilité d'utiliser les précomptes.

À retenir

Alors que de nombreux acteurs s'interrogeaient sur la pérennité du mécanisme du précompte, la directive sur la distribution d'assurances (DDA) ne supprime pas ce mécanisme d'avance sur rémunération.

 

À noter

Une commission précomptée peut générer un conflit d'intérêts, dans ce cas de figure, le recours à ce mode de rémunération exige donc d'être mentionné par le distributeur.

 

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