Coronavirus : l'assurance peut débloquer 35 Md€, selon les hôteliers-restaurateurs
Depuis le début du confinement, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH) met la pression sur les assureurs pour indemniser les restaurateurs contraints de baisser le rideau. Selon Alain Grégoire, président du syndicat patronal en Auvergne-Rhône-Alpes, le secteur peut aller encore plus loin que l'effort de 3,2 Md€ annoncé ces derniers jours.
Sébastien Acedo

Depuis le début du confinement, votre syndicat a multiplié les appels à une intervention massive des assureurs dans la prise en charge des pertes financières. L’assurance s’est engagée à mobiliser 3,2 Md€ pour participer à l’effort national. Est-ce suffisant ?
Nous saluons ce nouvel effort des assureurs pour contribuer à la solidarité nationale. C’est toujours mieux que le premier geste de 200 M€ annoncé fin mars. L’action que notre organisation a menée depuis cette date auprès de Bercy, Matignon et l’Elysée a sans doute porté ses fruits. Nous réclamions une intervention plus ambitieuse de ce secteur. Mais ces montants ne sont pas suffisants au regard des niveaux de croissance, de rentabilité et de solvabilité des assureurs. Nous voulons aller plus loin. Nos 80 000 entreprises du secteur de l’hôtellerie et de la restauration, dont 50 000 comptent moins de 10 salariés, souffrent depuis maintenant plus d’un mois. 99% des entreprises ont essuyé des refus d’indemnisation. Il faut que les assureurs puissent couvrir les pertes d’exploitation que nos adhérents subissent. Je veux aussi mettre la présidente de la Fédération de l’assurance, Florence Lustman, face à la responsabilité de ses propos : « Prévenir, accompagner et soutenir dans un monde marqué par l’incertitude, c’est la mission de l’assureur qui protège au quotidien et prépare l’avenir ».
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Selon les assureurs, une telle prise en charge coûterait près de 60 Md€ pour l’ensemble des entreprises françaises. Sans compter qu’elles n’ont pas collecté de primes pour couvrir ce type de sinistres…
Le coût des catastrophes naturelles n’a par exemple jamais affecté la solidité des assureurs français en termes de fonds propres et de solvabilité. A situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Selon nos calculs qui se basent sur les rapports financiers des plus grands assureurs et réassureurs français, nous estimons qu’ils peuvent mobiliser 35 Md€ en année pleine pour prendre en charge le coût du sinistre perte d’exploitation liée au Covid-19 de l'ensemble des entreprises françaises.
Comment avez-vous obtenu cette projection ?
Pour parvenir à ce chiffre, trois leviers peuvent être activés : un prélèvement de 10% des fonds propres des assureurs (soit 8 Md€ environ), la cession de 25% de leurs plus-values latentes actuellement immobilisées (soit 14 Md€ environ) et enfin la cession de 5% des actifs placés au bilan (soit 13 Md€ environ). Nous demandons une prise en charge des pertes d’exploitation à hauteur de 30% de la marge brute de nos adhérents sur une période de trois mois, ce qui représenterait un montant théorique d’indemnisation de l’ordre de 2,6 Md€ (1,2 Md€ pour les restaurateurs, 1 Md€ pour l’hôtellerie, 340 M€ pour les bars-cafés et 26 M€ pour les discothèques).
Comment votre organisation compte-elle peser dans les débats à venir sur la création d’un futur régime assurantiel ?
L’urgence de la situation appelle à une réponse immédiate. L’état de catastrophe sanitaire doit être reconnu pour la crise actuelle. Dans ma région, j’ai adressé des courriers à 67 députés et 28 sénateurs pour lesquels j’ai obtenu 80% de réponses. J’observe un front républicain, y compris des députés de la majorité, sur ce sujet. A l’avenir, nous appelons à la création d’un régime d’assurance des catastrophes sanitaires qui s’inspireraient du modèle du Gareat en France (pool de (ré)assureurs).
Les entreprises de l’hôtellerie et de la restauration sont-elles couvertes au titre des pertes d’exploitation avec dommages ?
Selon nos estimations, 30 à 35% de nos adhérents ont souscrit une garantie perte d’exploitation avec dommages. Ce n’est pas suffisant. Nous les encourageons à se doter de ces garanties dans leurs contrats d’assurance pour se couvrir contre la pandémie. Cette garantie pourrait, à terme, être enclenchée en cas de pandémie pour couvrir les frais fixes et limiter le reste à charge économique pour nos adhérents. Au-delà, l’assurance doit être au rendez-vous et à la hauteur des préjudices de nos entreprises en se détachant d’une simple lecture des contrats. Nous ne souhaitons pas casser le modèle économique de l’assurance mais le secteur à la capacité financière de faire face à la crise.
Propos recueillis par Sébastien Acedo
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