Digital : jeunes courtiers en ligne... sur une courbe d’apprentissage
Dossier Journées du courtage 2018

Ils sont plusieurs à s’être lancés sur la Toile, mettant en avant des solutions digitales plus simples et moins coûteuses que celles des assureurs traditionnels. Mais ces jeunes courtiers, très discrets sur les résultats, peinent encore à se faire une place.
Ils ont quelques traits communs : une cible très identifiée – indépendants, freelance, voire propriétaires de vélos ou de chiens et chats –, la volonté de simplifier au maximum l’assurance grâce au numérique et d’en réduire le coût en s’appuyant sur des communautés. Et un autre point les réunit?: une certaine discrétion sur leurs résultats. En effet, lorsqu’on tente de savoir comment se portent ces jeunes courtiers en ligne, apparus depuis deux ou trois ans sur un marché de l’assurance bousculé tous azimuts par de multiples innovations, aucun de ceux que nous avons sollicités ne communique de chiffres sur le nombre de contrats engrangés.
Lancé en 2015, Wemind, qui s’adresse au marché des freelance et des indépendants, reconnaît tout au plus avoir aujourd’hui quelque 20?000 membres dans son réseau, sur un marché évalué entre 1,5 et 2 millions de personnes. Le courtier propose d’abord une adhésion, qui permet d’accéder à des services (aide juridique, réductions sur des activités de loisir…) et ensuite de souscrire des contrats d’assurance en prévoyance, protection juridique, RC Pro et depuis peu une garantie logement. Mais rien n’indique que les adhérents au réseau Wemind soient également souscripteurs d’assurance. « Nos membres peuvent acheter le nombre de produits qu’ils souhaitent », souligne Hind Elidrissi, CEO et cofondatrice de Wemind. Un, deux, trois, ou même aucun s’ils ne veulent bénéficier que de la communauté de freelance créée autour de la marque. « Je pense que nous avons une spécificité assez forte, et notre développement se passe bien. Nous conservons l’avantage d’être le premier entrant sur ce type d’offre », ajoute la jeune femme, ex-Axa. Wemind, qui a signé des partenariats avec de grands assureurs (SwissLife, Allianz, MAIF) est d’ailleurs en pourparlers avec l’ancien employeur de Hind Elidrissi pour approfondir sa gamme. Parallèlement, le partenariat lancé durant l’été avec Gecina pour faciliter l’accès au logement des entrepreneurs et des indépendants, pourrait conférer à Wemind un supplément de notoriété. Et ainsi amener de nouveaux souscripteurs sur d’autres produits d’assurance.
Séduire et fidéliser de nouveaux clients
Tourné vers le même type de clientèle – entrepreneurs, patrons de TPE, indépendants –, le courtier +simple.fr vise davantage la simplicité d’usage, le gain de temps et la réponse à des besoins spécifiques pour le souscripteur plutôt que la création d’une communauté autour de produits et de services. « Quand un indépendant veut assurer l’ensemble de ses risques, il signe de cinq à dix polices d’assurance et reçoit environ mille pages imprimées ! » s’exclame Éric Mignot, son CEO. Or, selon lui, un seul assureur « traditionnel a réussi cette approche centrée sur le client : la MACSF, qui propose la couverture de l’ensemble des risques sur un nombre limité de contrats… »
Le business model de +simple.fr repose donc sur une technologie robot, mise au point par une équipe d’une quinzaine de développeurs notamment issus de la banque en ligne, qui permet d’assurer l’ensemble des risques d’un indépendant. Une technologie partagée avec un seul autre acteur dans le monde, à en croire Éric Mignot. Avec une dizaine de partenariats signés avec des assureurs (Generali, SwissLife…), et plus récemment Malakoff Médéric, avec qui il propose une offre de prévoyance individuelle à une cible de vendeurs à domicile indépendants, le positionnement de +simple.fr est toutefois en train d’évoluer, selon Éric Mignot. La start-up, qui a levé 11,8 M€ depuis son lancement, est dorénavant une plateforme technologique qui amène une solution à l’ensemble du marché de l’assurance – y compris de gros courtiers.
Élargir la distribution en s’ouvrant à d’autres courtiers, y compris en marque blanche, c’est aussi l’orientation plus BtoB prise par Otherwise, la marque du courtier Amalfi. La spécificité d’Otherwise est l’assurance collaborative : elle vise à créer des communautés d’utilisateurs autour d’un produit et à reverser les cotisations non consommées. Otherwise communique d’ailleurs sur un seul chiffre : celui du montant des cotisations reversées à ses assurés, matérialisation de sa promesse commerciale. Celui-ci atteint 17% en 2017, au terme de la première année opérationnelle. Résolument attaché à une stratégie multiproduit, Otherwise a également investi de nouveaux marchés. En mars, la marque a mis un pied dans le jardin de ses concurrents en signant un partenariat avec la FEDAE, la fédération des auto-entrepreneurs qui compte 80 000 adhérents, pour proposer une assurance santé. Mais la véritable niche de marché qu’elle semble investir est celle des chiens et chats, avec l’assureur Generali. « Nous nous sommes rendus compte, au contact de nos prospects, que l’on avait un trou dans la gamme?», souligne Cécile Mérine, cofondatrice. « De plus, pour les propriétaires d’animaux, le côté communautaire existe déjà naturellement. »
Cibler l’esprit communautaire
Enfin, Wizzas, l’un des derniers-nés de ces courtiers en ligne, le site ayant ouvert en novembre 2017, rassemble aujourd’hui une petite communauté de 250 propriétaires de vélos électriques, qui cherchent à être bien assurés compte tenu du coût de leur engin. La rentrée devrait voir l’émergence de nouvelles communautés : chefs d’entreprise indépendants (encore !), motards…mais contrairement à Otherwise, Wemind ou +simple, Wizzas ne cherche pas à atteindre le consommateur en direct?: « Nous passons par des associations ou des groupements », précise Thierry Delcupe, le fondateur, qui exclut pour le moment de travailler avec d’autres courtiers.
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