Catastrophes naturelles : l'indemnisation vue du ciel

Alors que la technologie de l'imagerie sattelite devient plus accessible, assureurs et réassureurs commencent à y avoir recours pour évaluer les dégâts provoqués par les ouragans et les inondations.

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Catastrophes naturelles : l'indemnisation vue du ciel
Ces images fournies par les satellites de la start-up Planet montrent la raffinerie Motiva à Port Arthur, dans le comté de Jefferson au Texas, avant le passage de l’ouragan Harvey qui a provoqué des inondations historiques dans cet État du sud des États-Unis. La comparaison entre l’image avant l’ouragan (ci-dessus), prise le 1er mai 2017, et l’image après l’ouragan, prise le 1er septembre 2017, permet de détecter les zones inondées (en vert à droite). L’imagerie satellite sert également à surveiller la reprise de l’activité dans les raffineries, et donc d’estimer les pertes d’exploitation. Ici, la fumée (photo de droite) indique que la raffinerie est en activité.

Et si l’avenir des assureurs dommages venait du ciel ? Longtemps cantonnés à leurs modèles mathématiques, ces derniers disposent désormais d’une nouvelle façon d’évaluer les dégâts causés par les événements climatiques : l’imagerie satellite. À l’heure où ouragans, inondations et autres aléas naturels deviennent de plus en plus récurrents, cette technologie pourrait leur permettre de cartographier les dégâts et les zones les plus touchées afin d’enclencher au plus vite le processus d’indemnisation.

Images quotidiennes

C’est ce que proposent des start-up comme Planet. Fondée aux États-Unis en 2010 par trois anciens scientifiques de la Nasa, cette société exploite les données issues d’une constellation de micro-satellites et garantit quotidiennement une couverture en images de chaque centimètre du globe. Une technologie qu’expérimente actuellement l’assureur australien QBE. Ce dernier l’a testée après l’ouragan Harvey qui a déclenché des inondations histo­riques à Houston au Texas, en septembre dernier. Avec 125 Md\$ de dommages (environ 101,7 M€), il s’agit de la deuxième tempête la plus coûteuse de l’histoi­re des États-Unis.

En utilisant les photographies satellites de la zone inondée avant et après l’événement, les assureurs peuvent procéder aux indemnisations « plus rapidement, plus facilement et de manière moins coûteuse », met en avant Trevor Hammond, directeur de la communication de Planet. En effet, la cartographie issue du ciel leur permet de constater quelles propriétés sont endommagées, sans attendre les déclarations de sinistres. « Notre imagerie satellite de moyenne et haute résolution permet notamment de repérer si les maisons inondées comportent ou pas une piscine. La présence d’une piscine accroît de 40 % la prime d’assurance. Or on estime que 15 % des propriétaires dans cette zone n’ont pas assuré leurs piscines », explique Trevor Hammond.

En France, les experts de Saretec utilisent eux aussi l’imagerie satel­lite pour évaluer les dommages générés par les inondations ou les tempêtes. Encore balbutiante, cette technologie est amenée, selon eux, à se répandre dans le secteur de l’assurance. « Le marché de l’imagerie satellitaire est disrupté aujourd’hui par l’arrivée de start-up ainsi que par la baisse du coût de mise en orbite des satellites, qui a été divisé par 50, explique Jean-Vincent Raymon­dis, directeur général adjoint de Saretec. Cela devient abordable économiquement et les programmes s’étoffent avec des centai­nes de satellites, de meilleu­res résolutions, et une fréquen­ce de revisite (ndrl : lorsque le satel­lite repasse sur une même zone une seconde fois) de plus en plus élevée. »

Le marché de l’imagerie satellitaire devient abordable économiquement et les programmes s’étoffent.

Jean-Vincent Raymondis, DG adjoint de Saretec

Des freins techniques

Baptisé Vega (Veille événements de grande ampleur), l’outil développé par ces experts s’est ainsi appuyé sur l’imagerie satellite lors des inondations d’octobre 2015 dans les Alpes Maritimes pour identifier les zones recouvertes par la boue. Mais l’exploitation immédiate de ces images se heurte encore à quelques freins techniques, notamment l’existence d’une couverture nuageuse qui suit généralement l’épisode de crue et obstrue la vision des satellites optiques. La Caisse centrale de réassurance (CCR), grâce à son partenariat avec le Sertit (Service régional de traitement d’image et de télédétec­tion), utilise ces cartographies pour confirmer ses « modèles d’aléas », en identifiant les zones inondées ou non. Dans le cas des ouragans, l’imagerie satellitaire se révèle beaucoup plus performante car le niveau d’endommagement des bâtiments est très élevé et les dégâts identifiables rapidement. CCR a ainsi eu recours pour la première fois à l’imagerie satellitaire afin de cartographier les dégâts générés par un cyclone, lors du passage dévastateur d’Irma sur les îles de Saint Martin et Saint Barthé­lemy en octobre dernier. « Nous avons demandé à notre partenaire, le Sertit, d’effectuer un comptage détaillé de l’ensemble des bâtiments affectés, avec une classification en fonction du taux d’endommagement », explique Antoine Quantin, directeur des réassurances et fonds publics de la CCR. Des données qui ont servi à « confirmer » l’évaluation produite par son modèle mathématique. En revanche, seuls des satel­lites à très haute résolution peuvent donner une image précise des dégâts à l’intérieur des bâtiments. CCR a donc eu recours, en complément, à des drones qui ont survolé la zone.

Mais ce frein devrait bientôt être repoussé, à mesure que les résolutions des satellites et leurs fréquences de rotation augmentent. « Autrefois, un pixel d’image satellite couvrait trois mètres de terrain. Aujourd’hui, il en couvre un. Et à l’horizon 2020, on devrait pouvoir disposer d’images toutes les 20 minutes, avec une très haute résolution, un pixel couvrant 20 centimètres d’espace terrestre », prédit Jean-Vincent Raymondis. De quoi permettre d’évaluer d’un simple coup d’œil les dégâts provo­qués par la grêle sur une toiture, par exemple.

L’archivage des images satellites est aujourd’hui utilisé dans le domaine agricole. Pacifica a, par exemple, développé une assurance prairie grâce à un partenariat avec Airbus Defense & Space. Les satellites de la filiale d’Airbus mesurent, à l’échelle d’une commu­ne, la baisse de la pousse de la prairie par rapport à la moyenne des 12 dernières années. L’éleveur assuré dont les prairies subissent une baisse de production reçoit alors une indemnité, calculée sur la base d’un indice de production fourragère, qui lui permet d’acheter des aliments de substitution pour son cheptel.

Notre imagerie satellite de moyenne et haute résolution permet notamment de repérer si les maisons inondées comportent ou pas une piscine...

Trevor Hammond, directeur de la communication de Planet

Mieux évaluer les risques

À l’avenir, l’archivage des images satellites devrait aussi permettre d’améliorer et d’actualiser la modé­lisation des risques, grâce à des données récentes sur les zones les plus exposées. Dans le cas du cyclone Harvey au Texas, les inondations ont, en effet, excé­dé la carte des zones à risques établie par la Fema, l’Agence fédérale américaine des situations d’urgence. Des données utiles en matière de prévention des risques naturels. À la demande de ses clients, Willis Towers Watson peut ainsi avoir recours à l’imagerie satellite pour évaluer quels seront les sites d’une entreprise les plus exposés à l’aléa naturel, de type séisme ou inondations, et voir quelles seront les zones concentrant le plus de dégâts. Demain, les satellites permet­tront aussi aux assureurs d’effectuer un monitoring en temps réel des biens et bâtiments qu’ils assurent, afin d’intervenir au plus vite. Un usage que teste déjà QBE dans les installations portuaires qu’il assure en Amérique du Sud.

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