Europe : vers la fin annoncée du régime d’exception dans l'assurance ?

Dans un rapport publié le 17 mars 2016, la Commission européenne se déclare hostile à la reconduction du règlement d’exemption par catégorie dans le secteur des assurances qui expirera fin mars 2017.

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Europe : vers la fin  annoncée du régime d’exception dans l'assurance ?

La question avait déjà été posée à la fin des années 2000 : faut-il maintenir les règles d’exemption spécifiques permettant de faire échapper à la qualification d’entente anticoncurrentielle certains types de coopération entre concurrents dans le secteur des assurances ?

Cette question avait à l’époque donné lieu à une levée de boucliers de la part des professionnels du monde de l’assurance. La Commission européenne avait par conséquent choisi de reconduire le règlement d’exemption catégorielle dans le domaine des assurances (règlement UE n° 267/2010, ci-après le « Règlement d’exemption »), mais dans une version amputée pour moitié, puisque seules deux des quatre pratiques exemptées jusqu’alors avaient été conservées.

Un an avant sa date d’expiration, la Commission ouvre à nouveau le ­débat sur la question de l’opportunité du maintien du règlement d’exemption et envisage trois options ; son non-renouvellement, son renouvellement dans sa forme actuel­le ou sa modification. Comme il est désormais de coutume, la Commis­sion a lancé une consultation publique sur ce sujet au cours du second semestre 2014, en appelant les personnes intéressées à faire part de leurs commentaires. La consultation publique et, plus généralement, la réflexion de la Commission s’articulent autour de deux questions : « Le secteur de l’assurance présente-t-il toujours des caractéristiques spécifiques qui justifient un besoin accru de coopération entre concurrents ? » et, dans l’affirmative, « Un instrument juridique tel qu’un règlement d’exemption est-il nécessaire pour permettre une telle coopération renfor­cée ? ». Ce sont ces considérations qui ont guidé la Commission dans le cadre de l’analyse des deux types de coopération actuel­le­ment couverts par le Règlement d’exem­p­tion : la réalisation en ­commun de compilations, tables et études et la couverture de risques en ­commun.

à retenir

  • La Commission considère que la réalisation en commun de compilations, de tables et d’études pourrait être encadrée par des lignes directrices plutôt que par un règlement d’exemption.
  • La Commission estime que les pools ne méritent plus d’être automatiquement exemptés en raison d’une mauvaise application des règles d’exemption et de l’apparition de formes de couverture en commun des risques moins restrictives de concurrence.

Réalisation en commun de compilations, tables et études

La spécificité des produits d’assurance est que leur conception repose sur un exercice de prédiction du risque potentiel. La fiabilité de cette prédiction est essentielle car la rentabilité des sociétés d’assurance en dépend. Aucune société d’assurance ne disposant à elle seule d’informations permettant un échantillonnage et une précision statistique suffisants, il est indispensable de permettre la mise en commun d’informations ­statistiques entre opérateurs. Cet échange d’informations est d’autant plus nécessaire depuis l’entrée en vigueur de la direc­tive Solvabilité 2 qui oblige les sociétés d’assurance à procéder à la « meilleure estimation » de leurs passifs, ce qui suppose d’affiner l’appréciation des risques et des provisions. Dans le cadre de la consultation lancée par la Commission, les sociétés d’assurance ont ainsi majoritairement plaidé pour un maintien de l’exemption pour les échanges de données statistiques en insistant en particulier sur le fait qu’un retrait de l’exemption pourrait conduire à limi­ter de tels échanges, ce dont pâtiraient prioritairement les petites sociétés d’assurance ne disposant que de peu de données internes ou les nouveaux entrants ne disposant d’aucunes données. La Commission reconnaît dans son rapport que les échanges d’informations entre opérateurs peuvent être justifiés, mais elle s’interroge sur la nécessité de maintenir une exemption catégorielle spécifique pour ces pratiques. En effet, elle estime que ce type d’échanges statistiques est déjà encadré et autorisé par ses lignes directrices de janvier?2011 sur la coopération horizontale entre concurrents. Elle préconise, par conséquent, le ­retrait de l’exemption catégorielle relative aux échanges de données ­statistiques au profit de l’application de lignes directrices, le cas échéant enrichies pour couvrir de manière plus détaillée les échanges dans le secteur des assurances.

Couverture en commun des risques

Bien qu’elle relève que le besoin de mutualisation des coûts et des risques peut exister dans d’autres secteurs que le secteur des assurances (par exemple dans le cadre de grands projets de construction), la Commission reconnaît qu’il peut exister un besoin de coopération spécifique entre ­sociétés d’assurance s’agissant de la couverture de risques en commun dans le cadre de groupements (pools) d’assurance ou de réassurance. Les groupements d’assu­rance ou de réassurance sont actuellement exemptés au titre du règlement d’exemption si leur part de marché ne dépasse pas respectivement 20 % et 25 % ou sans condition de part de marché, pendant trois ans, si le risque à couvrir est un risque nouveau. La Commission remet cependant en question l’opportunité de maintenir ce bloc d’exemption. Elle relève en effet que seul un faible nombre de pools d’assurance, 46 en 2014, entre dans le champ de définition des pools exemptés. Elle note à cet égard que les sociétés d’assurance ont tendance à appliquer de façon trop exten­sive le règlement d’exemption, soit en retenant une interprétation erronée de la notion de groupement, soit en omettant de vérifier la condition de seuil de part de marché. Elle considère par ailleurs que se sont développés sur le marché des modes alternatifs de couverture en commun des risques moins restrictifs de concurrence, tels que les groupements de coassurance ad hoc constitués par l’entremise de courtiers ou d’intermédiaires qui répartissent les risques, de leur propre initiative, ou à la demande de leurs clients. Ces formes de coassurance sont moins restrictives de concurrence en ce qu’elles reposent sur une mise en concurrence des coassureurs, notamment pour la sélection de l’apériteur, souvent dans le cadre d’appels d’offres. Compte tenu de ce constat, la Commission considère qu’il n’est plus possible de considérer que les pools remplissent les conditions permettant leur exemption automatique au titre d’un règlement d’exemption.

La Commission préconise par conséquent de ne pas renouveler le règlement d’exemption après mars 2017. Si cette option devait être retenue, il appartiendrait aux opérateurs d’apprécier au cas par cas si les pratiques d’échanges d’informations ou de couverture de risques en commun qu’ils envisagent de mettre en œuvre sont conformes au droit de la concurrence. Cet exercice peut s’avérer délicat et les entreprises perdraient en sécurité juridique. Reste à savoir si l’accueil que réservera l’industrie à ce rapport poussera la Commission à revoir sa position. Les parties intéressées ont jusqu’à la publication du rapport d’impact, prévu début 2017, pour faire entendre leur voix.

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