Un avis de contravention plus contraignant qu'une carte postale ?
Celui qui passe les frontières au volant ne rencontrera en général que peu de difficulté administrative, le titre de conduite qui lui aura été délivré par son administration nationale sera la plupart du temps reconnu par celle de son lieu de villégiature. Cette souplesse ne devra pas lui faire oublier qu'il pourra, à l'étranger, être poursuivi comme n'importe quel autre conducteur et même la commission d'infraction de faible gravité laissera quelques souvenirs. À défaut de carte postale, le contrevenant aura sans doute la surprise de recevoir à son domicile un avis de contravention en provenance de son lieu de vacances.
Jean-Baptiste le Dall, avocat à la cour, docteur en droit
L'été arrive et avec le beau temps l'envie de prendre la route pour partir loin des préoccupations quotidiennes. Parfois si loin que l'on sera amené à franchir les frontières et conduire à l'étranger. Dans le même temps, espérons pour l'économie nationale que des touristes étrangers auront la bonne idée de venir dépenser quelques euros ou devises étrangères chez nous. À cette occasion ils auront, peut-être, la chance de découvrir et d'expérimenter l'arsenal répressif dont la France a su se doter ces dernières années en matière d'infractions routières.
Par un effet de vase communiquant, ou d'un point de vue plus juridique de réciprocité, le conducteur français qui abandonne sa place dans les bouchons à un touriste étranger sera confronté aux mêmes vicissitudes que le conducteur étranger qui délaisse les routes de sa lointaine contrée.
Les règles de compétences applicables en droit pénal et la nécessité pour chaque État de faire respecter l'ordre public sur son territoire national ne laisseront que peu d'interrogations en cas d'arrestation pour des faits d'une gravité extrême. Le conducteur imperméable aux règles fondamentales applicables à la conduite d'un véhicule pourra être jugé et même condamné par un juge national.
Signalons, toutefois, que si un juge peut aisément interdire la conduite sur son territoire national, il ne peut en revanche retirer définitivement un titre délivré par les autorités d'un autre État membre.
C'est, par exemple, ce qui ressort, pour la jurisprudence française, d'un arrêt rendu par la chambre criminelle le 13 février 2007 : « Vu les articles 221-8 du code pénal et 42 de la Convention sur la circulation routière signée à Vienne le 8 novembre 1968 ; Attendu que si le second de ces textes permet aux juridictions françaises de priver un conducteur ressortissant d'un autre État signataire, qui a commis en France une infraction susceptible d'entraîner le retrait du permis de conduire en vertu de la législation française, du droit de faire usage, sur le territoire français, du permis de conduire, national ou international, dont ce conducteur est titulaire, il n'autorise pas ces juridictions à prononcer l'annulation du permis de conduire de ce même conducteur. » (Crim., 13 février 2007, n° 06-83.564).
La suspension de permis de conduire se traduira pour le conducteur étranger par une interdiction temporaire de circuler sur le territoire du lieu de l'infraction. D'un point de vue pénal, pour la commission d'une infraction par un étranger, les choses ne diffèrent que peu, tout du moins lorsque le prévenu daigne comparaître devant un juge lointain. Mais cette question n'est pas véritablement spécifique aux infractions routières.
À cette fin, des dispositions nationales peuvent toutefois être mises en place pour s'assurer d'un minimum d'implication de la part du fautif. Ainsi le code de la route français prévoit-il pour les conducteurs étrangers un mécanisme de consignation et même de rétention du véhicule. C'est ce qui est précisé par l'article L. 121-4 du code de la route : « Sauf cas de versement immédiat d'une amende forfaitaire ou d'une amende forfaitaire minorée, lorsqu'elles sont respectivement applicables, lorsque l'auteur d'une infraction se trouve hors d'état de justifier d'un domicile ou d'un emploi sur le territoire français ou d'une caution agréée par l'administration habilitée à percevoir les amendes garantissant le paiement éventuel des condamnations pécuniaires encourues, le véhicule ayant servi à commettre l'infraction pourra être retenu jusqu'à ce qu'ait été versée au comptable public compétent ou à un agent mentionné à l'article L. 130-4 porteur d'un carnet de quittances à souches une consignation dont le montant est fixé par arrêté. La décision imposant le paiement d'une consignation est prise par le procureur de la République, qui est tenu de statuer dans le délai maximum de vingt-quatre heures après la constatation de l'infraction. Le véhicule peut être mis en fourrière si aucune de ces garanties n'est fournie par l'auteur de l'infraction et les frais en résultant sont mis à la charge de celui-ci. »
L'arrêté du 19 décembre 2001 pris pour l'application de l'article L. 121-4 du code de la route fixe ainsi le montant de ladite consignation à 750 € pour les contraventions de la 5e classe, de 1 125 € à 2 250 € pour les délits punis d'une peine d'amende de 15 000 € au plus ; et de 2 250 € à 4 500 € pour les délits punis d'une peine d'amende de plus de 15 000 €.
Ce mécanisme de consignation montrera, bien évidemment, ses limites en l'absence d'interception du véhicule en infraction, et ces mêmes limites seront également atteintes en matière de contraventions constatées, par exemple, par radar automatique.
La question d'une éventuelle impunité de fait pour les conducteurs étrangers se posera en effet avec plus d'acuité pour des infractions plus légères, de simples contraventions et plus particulièrement pour les verbalisations n'ayant pas donné lieu à interception, car, c'est bien connu, le touriste n'informe pas l'administration en charge du traitement automatisé des infractions de son adresse à l'étranger et de son intention de violer les dispositions du code de la route.
Mais avant même la question de l'infraction du fait de la conduite d'un véhicule, se pose celle de la conduite d'un véhicule.
La validité du titre de conduite à l'étranger
La plupart du temps, la circulation à l'étranger avec son permis de conduire national ne posera pas grande difficulté. Les seules restrictions apparaissent lorsque le touriste, conquis par les charmes du pays nouvellement visité, décide de s'y installer. Dans cette hypothèse, l'administration de sa nouvelle terre d'accueil pourra lui demander de changer son titre d'origine au profit d'un permis local. En France, l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les États n'appartenant ni à l'Union européenne ni à l'Espace économique européen prévoit, par exemple, que « tout permis de conduire délivré régulièrement au nom d'un État n'appartenant ni à l'Union européenne ni à l'Espace économique européen est reconnu sur le territoire français jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an qui suit l'acquisition de la résidence normale en France ».
Avant ce désir d'installation en terres étrangères, le touriste pourra être confronté à des agents de police non polyglottes suspicieux quant aux catégories de véhicules autorisées à la conduite.
Le permis de conduire international
C'est pour cette raison que certains pays demanderont la détention par le touriste d'un permis de conduire international. Ce permis de conduire international n'est rien d'autre que la traduction du titre national. Il ne sera valable à l'étranger qu'accompagné du titre de conduite national. Il autorise la conduite des mêmes catégories de véhicules (auto, moto...) que celles du permis national.
Ce permis de conduire international sera, par exemple, obligatoire pour un Français souhaitant visiter la Colombie en voiture. Il en sera de même pour le Bénin ou en Afrique du Sud... Le touriste organisé se renseignera auprès des services de l'ambassade. Et comme la période estivale peut nous amener à nous éloigner des considérations purement juridiques, il sera signalé au conducteur français que même dans les pays se contentant du seul permis de conduire français, ce dernier risque de ne lui être que d'une faible utilité. La plupart des loueurs de véhicules exigeant la présentation d'un permis de conduire international...
Parmi les contrées exigeant le permis international, on citera également le cas de l'État de Floride, les Français de passage sur la péninsule devant être munis d'un permis international en plus de leur permis français.
Ailleurs, un road trip américain ne nécessitera pas forcément la détention du permis de conduire international. Le touriste français pourra ainsi conduire avec son permis national pendant les trois premiers mois de son séjour. La possession du permis de conduire international autorise la conduite pendant un an sauf pour le touriste français résidant, qui ne pourra circuler avec le permis international que trois mois.
Pour les Français désirant prolonger l'expérience américaine, il sera indiqué qu'un certain nombre d'États ont conclu avec la France des accords de réciprocité permettant de procéder à un échange de permis de conduire (Caroline du Sud, Colorado, Connecticut, Delaware, Floride, Illinois, Kansas, Kentucky, Maryland, New Hampshire, Ohio, Pennsylvanie, Virginie, Virginie Occidentale). Mais le plus simple pour ces touristes français sera peut-être de passer le Driver's Licence, l'examen auprès d'un centre agréé de Driving Licences étant à la fois sensiblement moins coûteux (une vingtaine de dollars) et beaucoup plus simple qu'en France.
Signalons, enfin, que le permis de conduire international ne permettra pas la conduite sur l'ensemble des routes du globe. La Chine exigera ainsi la détention du permis de conduire chinois.
Le permis de conduire international chez soi
La réalité est parfois triste à affronter, mais le propre du voyage réside, par certains côtés, dans son achèvement et dans le retour à la vie quotidienne ; se posera alors la question de l'utilisation du permis de conduire international.
Le permis de conduire international ne saurait conférer à son détenteur plus de droits que ceux que lui donne le titre national. La question des catégories du permis ne se posera pas, puisque le permis international aura été établi selon les catégories autorisées par le titre national, mais les interrogations ou plutôt les tentations pourront survenir à l'occasion de la perte de validité du permis national.
Le conducteur français en proie à une suspension ou une invalidation de son permis français ne pourra prétendre poursuivre la conduite du fait de la détention d'un permis de conduire international.
Il en ira, d'ailleurs, de même dans le cas où le permis de conduire international aurait été obtenu non par le biais d'un permis français mais sur la base d'un autre titre (par exemple, Crim., 14 mai 2008, n° 08-80.841). La poursuite de la conduite avec le seul permis de conduire international dans la boîte à gants se soldera ainsi par une condamnation du conducteur, la seule issue résidera éventuellement dans l'erreur de droit souvent invoquée et parfois même reconnue dans certaines circonstances (par exemple, Crim., 11 mai 2006, n° 05-87.099 : cas d'une attestation remise au prévenu par un agent de police judiciaire, agissant conformément aux instructions du parquet, selon laquelle la situation administrative du prévenu était régulière malgré l'annulation de son permis de conduire français).
La conduite au sein de l'Union européenne
Cette facilité éprouvée par le touriste à prendre le volant sera encore grande si celui-ci décide de limiter son périple à nos voisins européens. Le principe de libre circulation interdit aux États membres de limiter les droits des automobilistes européens.
La première directive relative à l'instauration d'un permis de conduire communautaire, du 4 décembre 1980, a ainsi posé le principe selon lequel les permis délivrés par un autre État membre doivent être reconnus sans imposer de nouveaux contrôles.
Le titulaire d'un permis délivré par un autre État membre devait toutefois encore échanger son permis dans l'année suivant son installation, en cas de changement de résidence. La directive du 24 août 1991 a abrogé cette procédure administrative et instauré le principe de la reconnaissance mutuelle obligatoire.
Précision apportée par l'article R. 222-1 du code de la route qui dispose que « tout permis de conduire national délivré à une personne ayant sa résidence normale en France par un État membre de la communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, en cours de validité dans cet État, est reconnu en France... ».
Le touriste européen pourra ainsi succomber aux charmes des États voisins sans avoir à se soucier de la moindre démarche relative au permis de conduire.
Le code de la route français a toutefois prévu l'obligation d'échange du permis de conduire délivré par un autre État membre lorsque le ressortissant étranger résidant en France a commis sur le territoire français une infraction qui aurait dû entraîner un retrait de points si le contrevenant avait été détenteur d'un permis français. Cette hypothèse dépasse toutefois largement la problématique de l'infraction commise à l'étranger.
Retenons le principe d'une libre circulation à l'intérieur de l'Union européenne Et c'est d'ailleurs pour prendre en compte cette possibilité de circulation avec un simple titre national qu'a été mis en place depuis le 19 janvier 2013 un permis de conduire européen avec l'entrée en vigueur de la troisième directive de l'Union européenne relative au permis de conduire (directive 2006/126/CE, adoptée le 20 décembre 2006).
Circulent, en effet, entre les différents États membres plus de 110 modèles de permis de conduire différents, de portée et de durée diverses. Le nouveau permis de conduire européen va donc considérablement simplifier la situation et le travail des forces de l'ordre. La Commission avant l'adoption de la troisième directive, pour promouvoir la nécessaire uniformisation posait la question suivante : « Comment être sûr qu'un permis délivré en 1955 par la RDA est encore valide ? »
On comprendra ainsi que les nouveaux permis de conduire délivrés en France depuis le 16 septembre 2013 ne présentent pas que l'intérêt d'un format carte de crédit plus simple à faire rentrer dans un porte-cartes, un portefeuille voire un sac à mains déjà fort garni.
Si l'oeuvre européenne de simplification se concrétise depuis quelques mois dans nos portefeuilles, ce permis de conduire format carte de crédit ne concerne finalement que les verbalisations opérées dans le cadre d'un contrôle routier. Or, la multiplication des radars automatisés, notamment sur le territoire français, pose l'épineuse question du paiement de l'amende par le conducteur étranger.
Le sort de l'avis de contravention en l'absence d'interception
Par « chance », la décision cadre du 24 février 2005 du Conseil de l'Union européenne relative à la reconnaissance mutuelle des sanctions pécuniaires a permis à la France, à peine un an après l'arrivée des radars automatiques, de se doter d'un dispositif visant à toucher les contrevenants étrangers.
La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a ainsi offert la possibilité à la France de faire exécuter ses amendes au-delà des frontières. La collaboration au sein de l'Union européenne n'a toutefois jamais été imaginée comme totale et systématique. Le bon sens reprend le dessus avec la possibilité de refuser l'exécution de la sanction pécuniaire lorsque celle-ci ne dépasse pas les 70 €.
L'exécution systématique de la sanction pécuniaire par-delà les frontières est un projet ambitieux et sujet aux aléas d'une volonté parfois moindre de partenaires européens dont le parc de radars automatiques n'est peut-être pas aussi développé. Aussi le législateur a-t-il pris soin de renforcer son dispositif en cas d'interception du contrevenant étranger. L'article L. 121-4 du code de la route permettait déjà de retenir et mettre de placer en fourrière le véhicule d'un contrevenant étranger.
Désormais le code de la route autorise la prise du véhicule en l'absence de paiement d'anciennes amendes. L'article L. 121-4-1 créé par la loi du 5 mars 2007 prévoit ainsi : « Lorsqu'un avis d'amende forfaitaire majorée concernant une contravention mentionnée à l'article L. 121-3 a été adressé par lettre recommandée au titulaire du certificat d'immatriculation ne pouvant justifier d'un domicile sur le territoire français et qu'il n'a pas été procédé, dans le délai de quatre mois à compter de sa date d'envoi, au paiement de l'amende ou à la réclamation prévue par l'article 530 du code de procédure pénale, le véhicule ayant servi à commettre l'infraction peut, en cas d'interception du véhicule conduit par ce titulaire, être retenu jusqu'à ce que celui-ci verse le montant de l'amende due aux agents mentionnés à l'article L. 121-4. Il en est de même si le véhicule est conduit par un préposé du titulaire du certificat d'immatriculation ou par le représentant de ce titulaire s'il s'agit d'une personne morale. Le véhicule peut être mis en fourrière si ce versement n'est pas fait par l'intéressé et les frais en résultant sont mis à la charge de celui-ci .»
Mais si après trois ans de cohabitation forcée avec les radars automatiques les conducteurs français avaient appris à ralentir à l'invitation du panneau signalant leur présence, ils ont pu également constater que leurs amis européens n'avaient nullement été effrayés par cette loi du 5 mars 2007.
S'il est toujours possible d'avancer que nos voisins ne lisent que rarement notre Bulletin officiel pour tenter de comprendre ce faible effroi, une autre explication pourrait également se concevoir à la simple lecture des dispositions de cet article L. 121-4 du code de la route. Le législateur y fait mention d'un délai de quatre mois à compter de la date d'envoi de l'avis de contravention. Le dispositif mis en place en 2007 implique donc l'envoi d'un avis de contravention. Mais encore faudrait-il que l'administration sache où envoyer cette missive...
C'est, à cette fin, que la France s'est rapprochée de ses voisins pour organiser un échange d'information indispensable à défaut duquel nombre d'avis de contravention resteraient lettre morte.
Des accords bilatéraux ont ainsi été signés avec le Luxembourg (accord de 2004 mais d'application géographique limitée), la Suisse (Accord de Paris le 1er juillet 2009), la Belgique (30 juin 2012), l'Espagne (1er août 2013), ou encore les Pays-Bas (15 septembre 2013).
La fin d'une relative impunité ?
La longue et parfois délicate mise en place des accords bilatéraux allait être éludée par l'entrée en vigueur de la directive européenne 2011/82/UE du 25 octobre 2011 facilitant l'échange transfrontalier d'informations concernant les infractions en matière de sécurité routière qui a, officiellement, pour objectif de mettre fin à l'impunité des automobilistes qui commettent des infractions à l'étranger, grâce à un système d'échange d'informations entre États membres de l'Union. La directive vise 7 infractions : les excès de vitesse, le non-respect du port de la ceinture de sécurité, le non-respect des feux de signalisation, et la conduite en état d'ivresse et sous l'emprise de drogues, le non-port du casque, la circulation sur une voie interdite, et, enfin, l'usage illicite d'un téléphone portable ou de tout autre équipement de communication en conduisant un véhicule.
Grâce à la plate-forme d'échange Eucaris, la France et son Agence nationale de traitement automatisé des infractions, l'Antai, allaient pouvoir accéder aux fichiers d'immatriculation des pays européens et donc aux adresses postales des contrevenants.
Cette perspective ne pouvait que satisfaire l'administration française puisque 30 % des excès de vitesse relevés en France ne donnent lieu à aucune verbalisation. Les causes en sont multiples : illisibilité de la plaque, présence de plusieurs véhicules... Mais ce pourcentage augmente significativement si l'on prend en compte les véhicules immatriculés à l'étranger pour atteindre les 42 %...
Depuis le 7 novembre 2013, l'administration française peut ainsi envoyer des avis de contravention partout en Europe (à l'exception de l'Irlande, du Royaume-Uni et du Danemark). Sans doute soucieuse de ne pas trop effrayer le touriste européen, l'Antai a traduit les formulaires de contestation en cinq langues : l'anglais, l'allemand, l'italien, le néerlandais et l'espagnol. Et le site de l'Antai est également accessible en ces cinq langues.
Le défenseur des automobilistes ne pourra toutefois que s'émouvoir de la situation du conducteur polonais ou slovaque qui recevrait une missive en provenance de Rennes. Le contrevenant français rencontre déjà les plus grandes difficultés à faire face à la procédure pénale française, on ne pourra donc qu'avoir une pensée pour le contrevenant étranger ne maîtrisant pas la langue de Molière ou tout le moins celle de Shakespeare. L'obstacle de la contestation surmonté, arrivera la surprise d'une éventuelle convocation en justice devant une juridiction éloignée de plusieurs centaines voire milliers de kilomètres de son domicile.
Son collègue conducteur français pourra le rassurer en lui expliquant que le tribunal dans sa bienveillance devrait fort opportunément avoir recours à la procédure de l'ordonnance pénale...
Mais n'oublions pas, et c'est là même que réside tout l'intérêt du principe de réciprocité, que ce genre de mésaventure pourrait tout à fait concerner un conducteur français en visite chez l'un de nos voisins européens.
Les conducteurs européens auraient dès lors pu se réjouir du récent arrêt rendu le 6 mai 2014 par la Cour de justice de l'Union européenne (affaire C-43/12) avec une inattendue annulation de la directive.
Au départ la proposition de directive était fondée sur la compétence de l'Union européenne en matière de sécurité des transports. Le 25 octobre 2011, le Parlement et le Conseil ont adopté la directive 2011/822, en retenant toutefois comme base juridique la compétence de l'Union européenne dans le domaine de la coopération policière. Estimant que la directive avait été adoptée sur une base juridique erronée, la Commission a introduit un recours en annulation devant la Cour de justice. Avec pour résultat cet arrêt du 6 mai.
Conformément à une jurisprudence constante, la CJUE retient la base juridique en fonction de l'objectif et du contenu de l'acte (voir sur ce point : CJCE, 26 mars 1987, Commission c/ Conseil, affaire 45/86).Lorsque l'acte répond à plusieurs objectifs, la cour choisira la base juridique correspondant au but principal (voir, par exemple, CJCE, 22 octobre 2013, Commission c/ Conseil, affaire C-137/12).
Même si le commentateur, peut-être légèrement partial, aura fait part de ses doutes quant à la finalité purement sécuritaire de cette directive, l'analyse juridique menée au niveau européen plaide très vite pour une base juridique liée à la politique de transport de l'Union européenne et s'insérant dans le champ de l'article 91 -1) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).
La censure par la CJUE devient alors logique, pour autant cet arrêt n'aura que peu de conséquences heureuses pour le conducteur. Tout d'abord conformément aux dispositions de l'article 264 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, la CJUE peut limiter la portée de son arrêt. Ainsi, la CJUE a considéré que « d'importants motifs de sécurité juridique justifient le maintien des effets de la directive jusqu'à l'adoption, dans un délai raisonnable qui ne saurait excéder un an ». La directive est donc annulée mais continue à s'appliquer, rien de neuf donc pour l'euro-contrevenant.
Plus grave, peut-être, avec la perspective d'une nouvelle base juridique, le futur texte délaisserait le fondement de la coopération policière (article 87 du TFUE) utilisé par la directive 2011/822 au profit de la sécurité des transports et donc de l'article 91 du TFUE comme souhaité par la CJUE dans son arrêt du 6 mai 2014.
Avec ce changement de fondement, c'est tout simplement le champ d'application géographique qui évolue puisque si l'Irlande, le Royaume-Uni et le Danemark avaient pu rester à l'écart des dernières réjouissances européennes, tel ne sera plus le cas : l'article 91 du TFUE n'épargnant aucun des 28 États membres.
Point d'échappatoire, donc, à l'avenir pour le contrevenant européen qui aura toutefois le soulagement de ne subir qu'une sanction pécuniaire épargnant la validité de son titre de conduite. Ainsi, même si le dispositif du permis à points séduit peu à peu de nombreux États membres (on citera par exemple la Lettonie convertie en 2004, le Danemark en 2005 ou l'Espagne en 2006), aucune correspondance n'existe même entre les États s'étant dotés d'un permis à points... Point d'uniformisation du retrait de points en perspective !
Si un juge peut aisément interdire la conduite sur son territoire national, il ne peut en revanche retirer définitivement un titre délivré par les autorités d'un autre État membre.
Le permis de conduire international ne saurait conférer à son détenteur plus de droits que ceux que lui donne son permis national. [...] Le conducteur français en proie à une invalidation de son permis français ne pourra prétendre poursuivre la conduite du fait de la détention d'un permis de conduire international.
La première directive relative à l'instauration d'un permis de conduire communautaire, du 4 décembre 1980, a ainsi posé le principe selon lequel les permis délivrés par un autre État membre doivent être reconnus sans imposer de nouveaux contrôles.
La décision cadre du 24 février 2005 du Conseil de l'Union européenne relative à la reconnaissance mutuelle des sanctions pécuniaires a permis à la France, à peine un an après l'arrivée des radars automatiques, de se doter d'un dispositif visant à toucher les contrevenants étrangers.
30 % des excès de vitesse relevés en France ne donnent lieu à aucune verbalisation. Les causes en sont multiples : illisibilité de la plaque, présence de plusieurs véhicules... Ce pourcentage augmente significativement si l'on prend en compte les véhicules immatriculés à l'étranger pour atteindre les 42%...
Article L. 121-4 du code de la route
« Sauf cas de versement immédiat d'une amende forfaitaire ou d'une amende forfaitaire minorée, lorsqu'elles sont respectivement applicables, lorsque l'auteur d'une infraction se trouve hors d'état de justifier d'un domicile ou d'un emploi sur le territoire français ou d'une caution agréée par l'administration habilitée à percevoir les amendes garantissant le paiement éventuel des condamnations pécuniaires encourues, le véhicule ayant servi à commettre l'infraction pourra être retenu jusqu'à ce qu'ait été versée au comptable public compétent ou à un agent mentionné à l'article L. 130-4 porteur d'un carnet de quittances à souches une consignation dont le montant est fixé par arrêté. La décision imposant le paiement d'une consignation est prise par le procureur de la République, qui est tenu de statuer dans le délai maximum de vingt-quatre heures après la constatation de l'infraction. Le véhicule peut être mis en fourrière si aucune de ces garanties n'est fournie par l'auteur de l'infraction et les frais en résultant sont mis à la charge de celui-ci. »
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