Devoir de conseil : Le casse-tête des exonérations sociales
Avec la réforme des exonérations sociales des régimes collectifs, les courtiers sont de plus en plus sollicités pour des questions juridiques. Un rôle complexe à ne pas confondre toutefois avec celui exercé par un avocat.
Le feuilleton du régime social des contributions patronales aux régimes de protection sociale d'entreprises s'apprête à connaître un nouvel épisode (lire encadré ci-dessus). Une circulaire d'application du décret du 9 janvier 2012 doit être publiée de manière imminente, afin de préciser tout particulièrement les fameuses « catégories objectives ». Autrement dit la possibilité de réserver le bénéfice d'un régime prévoyance, santé ou retraite à une partie seulement du personnel sans subir pour autant les foudres de l'Urssaf.
Ce document de la direction de la Sécurité sociale est atten-du avec impatience par les employeurs, les assureurs collectifs (compagnies, institutions de prévoyance, mutuelles)... et les courtiers. De fait, les intermédiaires se retrouvent aujourd'hui régulièrement interpellés sur ce terrain par leurs clients. « Nous accompagnons de plus en plus les entreprises sur les aspects juridiques, afin de sécuriser leur environnement financier et de vérifier qu'elles soient en règle avec l'Urssaf », explique Damien Vieillard-Baron, président de Gerep. Accaparés en interne par de nombreux autres sujets, notamment la gestion du temps de travail, « les directeurs des affaires sociales n'ont plus le temps de gérer ces questions juridiques », confirme Jean-Philippe Ferrandis, directeur des assurances de personnes chez Verspieren.
Un risque de défaut d'information
« En tant que courtier, quand il y a un changement de réglementation qui a un impact sur les garanties, nous avons un devoir d'information et de mise en conformité de ces dernières vis-à-vis de nos clients », explique Mathias Hildebrand, directeur de clientèle au sein du département market development chez Mercer.
Il s'agit là d'un point important, car si finalement certains de leurs clients devaient faire l'objet d'un redressement de la part de l'Urssaf pour des exonérations injustifiées, les courtiers pourraient alors être légitimement attaqués pour défaut d'information. « Notre rôle de conseil consiste également à anticiper et à peser l'ensemble des enjeux qui risqueraient d'avoir un impact, à l'issue de la période transitoire, sur le formalisme lié à la mise en place des contrats de nos clients », ajoute Fabrice Benharroche, directeur entreprises chez Henner.
Garder de la distance par rapport aux clients
Comme tous les grands noms du courtage, le groupe parisien dispose de son propre département juridique doté d'une équipe de juristes de formations spécialisés dans le droit et la fiscalité des assurances collectives de personnes. Toutefois, il n'est pas question de franchir la ligne jaune. « Nous ne sommes pas des cabinets d'avocats ! Nous pouvons faire de la pédagogie et conseiller les entreprises par rapport à l'impact de telle ou telle réforme législative. Pour autant, nous n'allons pas rédiger à la place de nos clients un accord d'entreprise ou une décision unilatérale pour la mise en place ou la modification d'un accord lié à ce décret », précise Mathias Hildebrand, chez Mercer.
Confrontés parfois à des dossiers épineux comme par exemple celui sur les « catégories objectives », les courtiers n'hésitent cependant pas à se faire aider. « Même si nous avons des juristes en interne, nous travaillons également avec des cabinets d'avocats sur les cas les plus complexes », souligne Édouard Héry, directeur des assurances de personnes chez Verlingue.
UN CHANTIER OUVERT DEPUIS PRÈS DE DIX ANS
- La loi « Fillon » de 2003 conditionne le bénéfice des exonérations sociales des contributions patronales en retraite et prévoyance au caractère collectif et obligatoire des régimes. Elle est précisée par un décret de 2005. Une circulaire de la direction de la Sécurité sociale du 30 janvier 2009 « synthétise » la doctrine, en abrogeant les différentes circulaires antérieures. Pour sécuriser le dispositif, notamment après la décision d'avril 2010 du TASS de Nanterre, la LFSS 2011 renvoie à un décret les cas de figures où un régime catégoriel peut bénéficier des exonérations. Les entreprises ont jusqu'à la fin 2013 pour se mettre en conformité. Une nouvelle circulaire doit préciser le décret publié le 9 janvier 2012.
LAURENCE CHRÉBOR, AVOCATE ASSOCIÉE AU CABINET FROMONT BRIENS
« Une connaissance accrue de l'environnement juridique et fiscal »
- Quel est le rôle des courtiers par rapport aux nouvelles règles d'exonérations sociales des régimes ?
Même s'il a un devoir de conseil, le courtier est avant tout là pour garantir la meilleure prestation d'assurance au meilleur coût. Il n'empêche, depuis la loi « Fillon », à chaque réforme, les experts-comptables demandent aux entreprises que leurs courtiers attestent par écrit que les contrats sont conformes. Cela nécessite donc pour les intermédiaires une connaissance accrue de l'environnement juridique et fiscal. Du coup, la plupart des cabinets de courtage, ont désormais recours à des services juridiques internes ou externes.
- Quel problème pose cette réglementation ?
En pratique, le décret du 9 janvier 2012 est loin de résoudre toutes les questions. Il y a des contradictions dans plusieurs articles. Un exemple : malgré une liste de cinq critères permettant de définir une catégorie objective de personnel, qui attestent du caractère collectif du régime, on se demande, à la lecture du dernier alinéa de l'article R. 242-1-1 du code de la sécurité sociale, si cette liste est limitative. On se surprend à espérer que la circulaire d'application nous apporte enfin un éclairage sur l'interprétation que vont en faire les Urssaf sur le terrain.
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