Les assureurs face aux Gafa (Tribune)
Par leur expertise dans la relation clients, les géants du web s’avèrent de redoutables concurrents pour les acteurs de l’assurance. La tribune de Bérénice Goales, directeur marketing & produits France au sein d’Affinion International

L’ubérisation du secteur de l’assurance est en marche : les acteurs historiques se voient challengés par les Gafa, engagés dans une stratégie de diversification de services et aujourd’hui prêts à conquérir ce marché. Amazon, pionnier du genre, propose déjà des services d’assurance dans certains pays. Santé, auto ou encore habitation, l’assurance Amazon est simple, flexible et s’appuie en grande partie sur sa maîtrise parfaite de la relation client, talon d’Achille des assureurs historiques. Si l’entreprise n’a pour le moment pas officiellement confirmé le développement de cette verticale en France, elle lançait en septembre 2017 sur Linkedin une campagne de recrutement de talents de l’assurance. Des offres affinitaires, des services diversifiés et des contrats plus souples : l’assurance de demain sera-t-elle à la carte, au détriment des formules classiques ?
Les GAFA comme accélérateurs de transformation digitale
La nature même de l’activité des assureurs freine le développement d’une vraie relation client : points de contacts fugaces (contrats longs tacitement reconductibles, …), échanges à portée négative avec le client (déclaration de sinistres, paiement de franchise, …) et absence quasi-totale de communication hors sinistre. C’est justement ce modèle que remettent en cause les GAFA, rois incontestés de la relation client, qui comptent inverser la perception de l’assureur pour en faire un compagnon du quotidien, et plus seulement lors de mauvaises nouvelles : l’assurance du futur s’adaptera à toutes les situations de la vie, qu’il s’agisse d’assurer son logement à l’année ou son smartphone pendant les vacances. Concrètement, cela se traduit par une offre 100% à la carte où est (presque) bannie toute forme d’engagement sur le long terme et un dialogue relancé via des interfaces mobiles (apps et sites mobiles) permettant un échange quotidien et non contraignant.
Si les investissements dans le développement d’applications mobiles ont explosé ces dernières années chez les assureurs, ils peinent toujours à en installer un usage régulier auprès de leurs clients qui ont, encore une fois, pour habitude d’appeler leur conseiller uniquement en cas de problème. Avec l’arrivée des Gafa, plus le choix : cette transition digitale « tout mobile » accélérée n’est pas sans rappeler celle des banques. S’il était encore inenvisageable il y a quelques années pour les particuliers d’effectuer des opérations bancaires sensibles depuis leur téléphone, cet usage est aujourd’hui totalement entré dans les mœurs. Cette transition digitale accélérée peut donc être compliquée à appréhender pour les grands groupes historiques, mais il faut l’envisager comme une opportunité de se nourrir de l’expérience de ces géants du web et ainsi participer activement à la mutation du secteur.
Acquérir pour survivre
Si les Gafa misent aujourd’hui sur le secteur de l’assurance, ils ne sont pas les seuls : les startups proposant des solutions innovantes et ultra ciblées se multiplient partout dans le monde avec un seul mot d’ordre : flexibilité. Parmi elles, quelques pépites qui pourraient changer la donne : +Simple (b2b) propose un parcours 100% digital et des contrats sans engagement de durée et sans délais de résiliation, Lemonade (immobilier) se targue d’être 100% digitale et prend en charge les vidéos, souvent plus parlantes que des photos, pour les déclarations de sinistres, ou encore Monuma (art & joaillerie) qui fait intervenir ses experts en collaboration avec Allianz.
De nouveaux assureurs développent, à partir d’insights clients, des produits sur-mesure sans engagement en 2 à 3 mois maximum, une opportunité que certains grands groupes se sont empressés de saisir. Deux voies s’offrent alors à eux pour exploiter le potentiel de ces nouveaux modèles : racheter les start up dont les services ultra ciblés viennent compléter leurs produits classiques sans nécessiter de ressources internes, ou incuber eux-mêmes des insurtech pour diversifier leurs expertises et attirer de nouveaux talents. C’est par exemple la stratégie adoptée par la Société Générale, qui a récemment créé Moonshot-Internet. Cette insurtech intégrée déploie des assurances b2c sans engagement qui n’entrent pas en concurrence directe avec les produits historiques du groupe, développées dans un temps record de 90 jours. Stratégiques, ces investissements garantissent à ces acteurs historiques d’innover vite, bien et de répondre à l’évolution des attentes des consommateurs.
Diversifier ses expertises pour enrichir la relation avec ses clients et les fidéliser est un défi majeur du secteur. Rendez-vous est pris dans quelques années pour mesurer les effets de la transformation digitale dans la relation des assureurs avec leurs clients et l’usage que feront ces derniers de ces nouveaux modèles d’assurances plus flexibles, mobiles, répondant à un besoin à un instant T.
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